L’Espoir du Londeau : un lieu de prévention primaire où rétablir les liens sociaux

Cécile FLEUREAU, 2006

L’Espoir du Londeau est une association implantée à l’entrée de la cité du Londeau de Noisy-le-Sec, au rez-de-chaussée d’un immeuble. Sa création en 1996 s’est faite sous l’impulsion de l’association des locataires du Londeau qui, face aux nombreuses interpellations des habitants à propos des problèmes de toxicomanies qui touchaient le quartier, a décidé d’agir. Dès le début, l’accent a été mis sur la prévention primaire. L’Espoir du Londeau a pour but de rétablir les liens sociaux dans la cité et de prévenir en amont les conduites à risques en s’adressant à tous les publics. Elle dispose pour cela d’une dizaine de bénévoles, dont deux à temps plein, et de deux salariés : une psychologue et une médiatrice de prévention santé, embauchées en 1999. Pour mener ses actions à bien, l’association compte de nombreux partenaires comme l’Association départementale de sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence (ADSEA), le réseau Vigie 93, le Comité départemental d’éducation pour la santé, la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM)…

Un lieu d’écoute pour tous

Pour l’association, la prévention des conduites à risques s’est traduite d’abord par l’ouverture d’un local d’accueil pour tous, à proximité des habitants, afin de rétablir le dialogue et d’éviter l’exclusion de certaines populations. Ce lieu d’écoute et d’information autour de la prévention, théoriquement soumis à des horaires de permanence, accueille à toute heure parents et enfants du quartier, mais aussi des personnes n’habitant ni le Londeau, ni Noisy-le-Sec, car l’association fait de l’accueil « bas seuil »1. Les deux salariés de l’association et la bénévole qui assurent ces permanences sont à l’écoute de tous les types de problèmes. Les personnes viennent principalement pour des conseils d’ordre social, sanitaire et scolaire, pour être aidées dans leurs démarches administratives ou être orientées vers des structures adaptées à leurs besoins. Ces demandes sont souvent le point de départ d’une discussion où d’autres difficultés sont abordées, où la parole se libère. Lors de ces moments, les professionnels de l’association apportent leur soutien tout en rappelant les risques de certaines conduites. Bien ancrée dans la cité, l’association semble avoir acquis la confiance de ses usagers. Elle a reçu en 2000, 642 personnes dont plus de 100 sont venues pour la première fois.

Afin de favoriser le lien social, l’Espoir du Londeau est à l’origine de la création d’un journal sur le quartier : L’événement du Londeau. Distribué à tous les habitants du Londeau, ce journal est réalisé par des habitants, des professionnels de santé et des militants associatifs. Les articles y ont une visée informative sur la vie du quartier et préventive, en lien avec l’activité de l’association.

A partir des difficultés repérées lors des permanences, des actions de prévention ciblées auprès des jeunes et des femmes du quartier sont programmées.

Le public cible des 15/25 ans

Des rencontres sont organisées avec des groupes de jeunes du Londeau autour de thèmes comme l’alcool, le tabac, les maladies sexuellement transmissibles (MST), les relations sexuelles. Garçons et filles y sont invités séparément. Ces rencontres se déroulent en deux temps : projection d’une vidéo, puis débat animé par un professionnel (médecin ou militant associatif).

L’Espoir du Londeau intervient auprès des filles de deux classes de CAP du Lycée professionnel Moulin-Fondu de Noisy-le-Sec. Au cours de l’année scolaire, des médecins font de la prévention sur les MST, le SIDA et les hépatites et abordent avec elles des questions portant sur la connaissance de son corps et la sexualité en lien avec les pratiques culturelles. Dans ce cadre, l’Espoir du Londeau et la CPAM de Seine-Saint-Denis organisent une journée " Bilan de Santé «  : le matin les jeunes filles passent un bilan de santé complet avec un dépistage VIH et un bilan gynécologique ; l’après-midi est consacré à un débat provoqué à partir de photographies proposées au groupe ; la journée se termine par des entretiens individuels où le médecin livre à chacune les premiers résultats de l’examen de santé. Trois semaines plus tard, le médecin de la CPAM vient au lycée rendre et commenter à chaque jeune son bilan de santé.

Pour les 15-25 ans, l’association dispose d’un outil informatique de « prévention à la carte » conçu par le docteur Shelly et fourni par l’association Arémédia. Cette borne interactive vise à promouvoir la prévention personnalisée des conduites à risque. L’utilisateur y inscrit seul et de manière anonyme son parcours de vie à travers un questionnaire arborescent à l’issue duquel une réponse personnalisée est délivrée, orientant le consultant en fonction des risques éventuels déclarés vers une structure d’accueil de proximité appropriée. Au lieu d’envisager la prévention par thème, cette borne interactive met en perspective les risques à travers l’histoire de vie du sujet et peut ainsi identifier les logiques communes à ces conduites. Les données enregistrées dans les différentes bornes Arémédia sont ensuite recueillies et étudiées pour élaborer de nouvelles stratégies de prévention. Après avoir utilisé la borne, le jeune peut discuter du questionnaire avec la médiatrice. L’utilisation de cette borne est proposée dans le cadre des réunions de jeunes du Londeau ou lors d’entretiens individuels. Cet outil a également été présenté aux délégués de huit classes de baccalauréat professionnel du lycée professionnel Moulin-Fondu pour qu’ils en informent leurs camarades de classe.

La prévention en direction des plus jeunes

Crée en 1998, la chorale d’enfants est aussi un outil de prévention : elle permet d’impliquer les enfants du quartier, de leur apprendre le respect de l’autre à travers une activité de loisir, et d’entrer en contact avec les parents. Dix-huit enfants de 7 à 13 ans participent à cette chorale tous les samedis après-midi. La chorale organise des représentations dans les maisons de retraites et les écoles. Chaque répétition se termine par un goûter. Ce moment de détente permet de discuter avec les enfants de leur semaine et de leurs problèmes. Des activités de prévention viennent s’y greffer : par exemple, un brigadier-chef est venu parler aux enfants et les a invités à visiter le commissariat.

Les rencontres de femmes

Depuis septembre 2001, un groupe de femmes se réunit une fois par mois dans les locaux de l’association, le soir, autour d’un café, d’un thé à la menthe et de pâtisseries confectionnées par les femmes. La plupart sont d’origine maghrébine et ont entre 30 et 60 ans. L’objet de ces rencontres est de transmettre une information et de favoriser le dialogue grâce à une atmosphère conviviale. Le premier thème abordé était l’euro : une receveuse des impôts de Saint-Denis est venue discuter avec le groupe. La seconde soirée a porté sur la transmission de la culture et les filles sont venues débattre avec leur mère sur le sujet. Depuis, une soirée mère-fille est prévue une fois par trimestre

1 Selon la Mission départementale de prévention des toxicomanies de Seine-Saint-Denis, le niveau « Bas seuil » est un terme qui renvoie à l’idée d’un changement de seuil ou d’exigence quant à l’ouverture et l’accessibilité des services proposés. Le « bas seuil » propose des espaces largement ouverts sur la rue, avec un minimum de conditions exigées (ne pas être violent, ne pas consommer dans les locaux, ne pas vendre).

Sources

  • Entretien avec BOONE Josette, coordinatrice, BARROS-SOARES Elsa,

To go further

  • Contact : L’Espoir du Londeau, 17 rue Paul Verlaine 93130 Noisy-le-Sec Tél./fax : 01 48 44 13 22, E-mail : espoirlondeau@wanadoo.fr