A Hanovre, un terrain d’anciennes casernes est transformé en quartier modèle du point de vue écologique et social

Ina Ranson, 1999

Cette fiche présente les actions mises en oeuvre par Hanovre en matière de développement territorial durable.

Hanovre (525 000 habitants), capitale de la Basse Saxe, accueillera, en l’an 2000, l’exposition mondiale. Signe du temps : l’attraction spécifique et pérenne qui illustrera les progrès de la technologie moderne sera un quartier ultra-moderne, construit selon les postulats de l’Agenda 21. Et les habitants, invités à trouver « un style de vie durable » en feront partie - tout au moins faut-il l’espérer. Car la devise de l’exposition est bien « l’homme, la nature, la technique ».

Le nouveau quartier de Kronsberg est situé sur une colline, à quelques 100 mètres du terrain propre de l’exposition. En l’an 2000, il sera déjà en partie habité ; environ 3000 logements (sur 6000 planifiés) seront terminés.

« Les meilleurs déchets sont ceux qu’on évite de produire. »

A Kronsberg, cette devise s’applique dès l’aménagement des espaces et la conception architecturale. Les terres entassées avant le début des constructions ont été mises à la disposition d’une « agence de gestion des remblais ». Fondée par la Ville, cette agence s’occupe des contacts entre ingénieurs de bâtiments, paysagistes et jardiniers des environs pour que les terres puissent être utilement valorisées au lieu de devenir des déchets qu’il faut transporter des milliers de km.

Les déchets de construction - gravats, métaux, cartons - sont triés sur place, ce qui permet d’en recycler une grande partie.

Les investisseurs doivent se plier à des règles strictes : ne seront utilisés que des matériaux de construction dont l’écobilan atteste qu’ils ne causent pas de dégâts à l’environnement. A proscrire, par exemple : les panneaux traités par des formaldéhydes, les FCKW (fluorohydrocarbones) et les PVC dont la mise au rebut ou l’incinération est problématique.

Quant au concept concernant les déchets industriels et ménagers du quartier, il devra illustrer comment on peut les diminuer de moitié. Diverses mesures doivent y concourir : l’introduction de systèmes de tri et de ramassage proches des maisons, l’installation de containers esthétiques et bien intégrés à l’environnement urbain et enfin l’offre de marchandises et de services adaptés.

Les économies d’énergies devront réduire les émissions de CO2 d’au moins 60 % (si ce n’est 80 %). Elles seront obtenues sans que les habitants n’aient à renoncer au confort. Tous les bâtiments du nouveau quartier seront construits selon les normes de faible consommation d’énergie, c’est-à-dire que la consommation d’énergie de chauffage sera limitée à 50kWh par m2 par an. 100 à 150 logements démontreront qu’il est possible de faire encore mieux en récupérant la chaleur par des installations techniques sophistiquées : ainsi équipés, ces logements n’auront besoin que de 10 à 15 kWh/m2 par an.

Les architectes et les artisans suivent un programme spécial de formation et leur travail est continuellement contrôlé par des experts qualifiés. Comme la consommation d’énergie dépend aussi du comportement des habitants, ceux-ci reçoivent également des informations et des formations adaptées. Évidemment, tous les appareils techniques, en particulier les appareils ménagers seront soigneusement choisis en fonction de leur faible consommation d’énergie.

Les machines à laver et les laves-vaisselle seront alimentés par l’eau chaude en provenance des réseaux de chaleur. L’énergie sera fournie par des centrales de cogénération, construites près des logements, ou par des sources d’énergies renouvelables. Il est prévu que 100 à 200 appartements seront liés à un grand réservoir souterrain d’eau chauffée par des capteurs solaires. On a également planifié des éoliennes totalisant une puissance de 5 MW. Enfin, une des centrales de cogénération sera alimentée par des piles à combustibles.

Le projet « optimisation énergétique de Kronsberg » est subventionné par le programme Thermie de l’Union Européenne.

A Kronsberg on mettra à profit des moyens techniques modernes pour économiser l’eau et pour utiliser l’eau de pluie à des fins sanitaires. Plus intéressant encore est un concept novateur permettant de favoriser l’infiltration normale des précipitations sur le terrain même des constructions. Comme à beaucoup d’endroits le sol est peu perméable, il a été décidé de créer un système spécifique de « cuvettes et rigoles ». De nombreux caniveaux recueillent l’eau de pluie qui est alors dirigée dans des cuvettes couvertes d’une couche d’humus d’environ 30 cm d’épaisseur ; l’eau traverse ces couches en se purifiant, puis est recueillie, sous terre, dans des réservoirs (appelés « rigoles ») et drainée vers des espaces de rétention aménagés comme un parc et situés en bas de la pente du quartier. Une partie de l’eau peut alors s’infiltrer dans le sol, le reste est recueilli dans un joli bassin verdi et quitte le terrain par un fossé.

Le système des « cuvettes et rigoles » embellit les cours et les jardins, les rues et les parcs. Il apporte une innovation remarquable dans le domaine de la gestion des eaux de pluies.

Kronsberg sera un « quartier aux chemins courts » ; personne n’aura à marcher plus de 600 m pour trouver un arrêt de tram. Pourquoi donc posséder une voiture à Kronsberg ? On espère que beaucoup d’habitants comprendront que ce n’est pas vraiment la peine… Chacun pourra profiter d’un excellent service de co-voiturage.

La voiture n’est qu’un exemple des choses à partager. Qui veut mener un « style de vie durable » possèdera moins et bénéficiera de plus de convivialité. A Kronsberg sera expérimenté, dans le cadre de l’exposition 2000, un projet de « consommation sans propriétaire », lancé et supervisé par le département des études du marché et de la consommation » de l’Université de Hanovre. On trouvera sur place, par exemple, de nombreux « centres de communication et de soins de linge » qui offriront une agréable alternative à la possession personnelle d’une machine à laver. Et inutile, à Kronsberg, d’acheter des outils qui ne servent que rarement ; il suffira de s’adresser à un centre de location spécifique.

Les habitants de Kronsberg profiteront-ils vraiment de ces services ? Un sondage mené par les responsables du projet présente des résultats plutôt encourageants. Plus de la moitié des personnes interrogées se déclarent prêtes à participer aux services de partage. « Il ne s’agit pas d’un phénomène de niche. On peut dire qu’il existe là un réel créneau pour le marché », dit Ulf Schrader, économiste à l’université de Hanovre.

Quant à la question de savoir si les habitants de Kronsberg vivront à la hauteur de l’ambition d’un « quartier durable », elle reste, pour l’instant, ouverte. De toute façon, il y aura, sur place, une agence de communication qui se chargera de distribuer informations, formations, conseils… Elle invitera aussi à la participation des citoyens.

Références

La source principale de ce texte est une conférence d’Elisabeth Czorny, Umweltdezernat der Landeshauptstadt Hannover, faite en juin 1998 à l’Institut Goethe de Lille.