L’École Transfrontalière en Économie Sociale et Solidaire (ETESS)

août 2020

Conseil économique, social et environnemental régional (CESER)

ETESS a pour orientation d’outiller les acteurs locaux (collectivités locales, associations et entreprises) en tant que promoteurs d’initiatives collectives et de nouvelles formes d’activités. La création d’activités fondée sur l’ESS y est abordée comme un levier pour tirer parti du potentiel économique endogène des territoires et solidifier le tissu économique local.

Le projet vise à étendre les activités et pratiques de l’Économie Sociale et Solidaire sur un territoire transfrontalier comprenant le Sud Aquitaine (Pyrénées-Atlantiques et Sud Landes) mais aussi les communautés autonomes de Navarre et d’Euskadi. Il est issu d’une coopération de plusieurs années entre le CBE et les réseaux coopératifs de Navarre (ANEL) et d’Euskadi (KONFEKOOP).

L’économie sociale et solidaire : une ambition régionale partagée au-delà de la frontière

L’Économie Sociale et Solidaire (ESS) désigne un mouvement social et économique rassemblant des organisations collectives cherchant à concilier une activité économique avec une utilité sociale 1. En Nouvelle-Aquitaine, l’ESS représente l’un des deux axes majeurs du développement économique de la Région établis au sein du Schéma Régional de Développement Économique, d’Innovation et d’Internationalisation (SRDEII) de 2016. La feuille de route « Néo Terra » dédiée à la transition environnementale et climatique renvoie, pour plusieurs de ses objectifs, directement ou indirectement aux acteurs de l’économie sociale et solidaire. Notre région est la première région française à porter une Direction dévolue à l’ESS. Parmi les raisons de cet engagement régional à soutenir l’ESS : son poids important dans la région (troisième région de France en poids de l’ESS) et des raisons liées à l’histoire de la région. Pour citer quelques exemples : le département des Deux-Sèvres et plus particulièrement la ville de Niort, sont le berceau historique des mutuelles en France alors que la Creuse, véritable laboratoire d’innovation en milieu rural, connaît une forte dynamique associative et le Pays basque, avec 3 556 coopératives possède une culture de coopération très marquée.

En Navarre, les entreprises d’ESS comprennent plus de 13 000 salariés. En 2017, l’ESS représente 25 % de l’emploi privé de la région, ayant augmenté de 73 % depuis 2015. La communauté forale s’est dotée d’un Plan intégral de l’Economie sociale 2017-2020 qui définit les lignes stratégiques pour le secteur.

En Euskadi, les coopératives du territoire ont vu leurs effectifs salariés se réduire en 2014. En revanche, le nombre de nouvelles coopératives créées augmente : 213 pour la seule année 2014.

L’École Transfrontalière en Économie Sociale et Solidaire (ETESS)

Le projet d’ETESS a été pensé, à la fois, comme un facteur structurant du transfrontalier et comme un outil permettant de mettre en agenda de façon permanente l’économie sociale et la coopération au travers d’un travail collectif entre des acteurs de la Nouvelle-Aquitaine, de l’Euskadi et de la Navarre 2. A l’initiative du projet, se trouve un collectif regroupant la Confédération de Coopératives d’Euskadi (KONFEKOOP), le Comité de Bassin d’Emploi du Seignanx (CBE-Seignanx ), la ville d’Hendaye et l’Association des Entreprises de l’Économie Sociale de Navarre (ANEL). La formation a été identifiée comme une priorité à la suite d’un diagnostic des besoins des territoires. Objectifs : tout en exploitant le potentiel endogène du territoire, le projet vise à mobiliser les pratiques de l’ESS pour outiller les porteurs des d’initiatives collectives et accompagner l’émergence des nouvelles formes d’activités créant de l’emploi de qualité. À terme, il s’agit d’apporter des réponses aux enjeux sociaux et solidifier le tissu économique local. Les bénéficiaires directs du projet sont les collectivités locales, les acteurs locaux, les entreprises de l’ESS, les porteurs de projets, les salariés des réseaux de l’ESS sur les trois territoires impliqués. Les résultats attendus sont le développement d’une offre de formation conjointe, un réseau transfrontalier d’agents locaux, la mise en place d’un centre de ressources et le montage des projets collectifs et des emplois créés dans les territoires d‘expérimentation

La coopération comme méthode de formation

L’ETESS conçoit la coopération en général et la coopération transfrontalière en particulier comme une autre façon d’apprendre, de se développer et de « changer de lunettes » pour comprendre le point de vue de l’autre. Mise à l’épreuve des échanges transfrontaliers, cette option est validée par des résultats concrets, notamment : l’adaptation du modèle français à la réalité navarraise avec la création de la première coopérative d’entrepreneurs en Espagne et sa réplique à d’autres régions espagnoles 3. La coopération est ainsi systématisée comme une méthode par étape allant du développement d’une connaissance mutuelle, à la mise en place d’une coopération transfrontalière sur la base d’une organisation durable en passant par le développement d’une offre de formation conjointe et la mise en oeuvre d’initiatives communes dans chaque région4.

Cette co-construction de pratiques permet de lever, ou du moins d’atténuer, un certain nombre d’obstacles inhérents aux échanges transfrontaliers en matière de formation et emploi tels que la barrière linguistique, les différences de statut, les difficultés pour valider les diplômes 5. Elle permet aussi de pallier les différences économiques, administratives et institutionnelles entre les différents territoires 6.

Quant à l’innovation en matière de formation et d’emploi, comprise comme un phénomène territorial « par le bas » renvoyant à la capacité d’action des citoyens et citoyennes, elle implique la convergence des objectifs économiques, de développement des potentialités individuelles et de citoyenneté. Il s’agit de mettre en pratique des nouvelles formes de travail, de production, d’entraide, de connaissance et d’apprentissage. C’est l’expérimentation de façon inédite en réponse aux défis contemporains 7

À l’aide des Pôles territoriaux de coopération économique (PTCE), les questions économiques et sociales s’organisent dans les territoires autour des alternatives aux formes concurrentielles.

Le périmètre du transfrontalier

Les pratiques des acteurs se trouvent au coeur du projet de l’ETESS. De ce fait, les projets sont incarnés dans les réalités d’emploi et les besoins locaux. C’est ce qui définit en première instance le périmètre transfrontalier de l’action de l’ETESS. Néanmoins, cela n’exclut pas l’utilisation des innovations conceptuelles et méthodologiques émergeant dans le cadre du projet (les modules de formation en coopération par exemple), par d’autres acteurs sur d’autres territoires. L’ambition du projet est d’inscrire les acquis de l’ETESS dans un processus de long terme avec une continuité assurée par des projets futurs qui viseraient à intégrer les centres de connaissance des trois territoires, à développer la formation, les méthodologies et des indicateurs de résultats concrets. Dès le départ, il y a une vraie volonté d’essaimer et diffuser les résultats.

La certification

Les structures participant au projet trouvent des réponses techniques aux problèmes liés à la certification. Celles-ci sont basées sur un système informel de reconnaissance au niveau des membres du réseau qui permet de reconnaître les compétences. Néanmoins, le projet constate qu’il faut aussi réinterroger le politique pour formaliser des solutions et les rendre durables

1 Depuis 2014, l’ESS est reconnue en France par la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire.

2 Audition de Stéphane Montuzet, Gérant de la SCIC INTERSTICES CAE (Société coopérative d’intérêt collectif) et membre du CESER, 9 octobre 2019.

3 Audition de Antonio Martinez de Bujanda, Gérant d’ANEL, 9 octobre 2019.

4 Audition de Antonio Martinez de Bujanda, Gérant d’ANEL, 9 octobre 2019.

5 Audition de Laurent Rebiere, Gérant de SCIC PERF (Centre territorial de formation) et membre du CESER, 9 octobre 2019.

6 Audition de Antonio Martinez de Bujanda, Gérant d’ANEL, 9 octobre 2019.

7 CESER Nouvelle-Aquitaine, 2019, Systèmes et bonnes pratiques en matière de services sociaux et innovants en Nouvelle-Aquitaine. Rencontre entre les délégations du CES de la CAPB et du CESER Nouvelle-Aquitaine, février 2019.

Références

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