Pourquoi coopérer entre territoires ?

Katia Buoro, Xavier Desjardins, 2012

Pourquoi les territoires coopèrent-ils ? La raison la plus souvent avancée est qu’il convient de mettre en adéquation le périmètre des structures décisionnelles ou gestionnaires avec le fonctionnement des espaces géographiques. En effet les territoires « vécus » mutent rapidement alors que les structures politico-administratives sont rigides, ou tout au moins, doivent s’inscrire dans le temps pour fonctionner et prendre une véritable consistance identitaire. Communes, départements et régions en France, Gemeinde ou Länder en Allemagne doivent leur reconnaissance à leur inscription dans le temps long de l’histoire administrative et politique. Mais pour gérer les questions de transport, d’habitat ou encore d’urbanisme, on conçoit facilement qu’il faille reconsidérer les maillages administratifs ou faire coopérer les collectivités locales existantes pour mener des politiques cohérentes. Les villes s’étendent au-delà des limites des communes, les déplacements quotidiens sont parfois sur plusieurs départements, et les réseaux d’entreprises ou d’université sont interrégionaux. De tels problèmes imposent des coopérations entre collectivités.

Mais au-delà de cette nécessaire réconciliation des géographies, géographie administrative et géographie vécue (vécue par les habitants, par les entreprises, par les réseaux, etc.), bien d’autres éléments conduisent les territoires à coopérer. Des coopérations existent pour des raisons de partage de richesses fiscales ou de mutualisation de coûts. D’autres sont principalement liées à la volonté des élus de réformer l’administration par la création de nouvelles configurations de travail : les structures intercommunales sont par exemple vouées à exercer de nombreuses fonctions administratives et techniques autrefois dévolues aux communes, ce qui n’est pas sans susciter de nouveaux organigrammes, donc de nouvelles organisations et de nouvelles manières de travailler. Parfois, les coopérations sont suscitées pour faire vivre des solidarités, entre riches et pauvres, quand leurs proportions sont très différentes d’une collectivité à l’autre, ou entre personnes d’origine différente quand la ségrégation ethnique est forte. Enfin, des raisons économiques (parfois réelles, parfois fantasmées) peuvent susciter des coopérations. Les systèmes économiques changent et il semble qu’aujourd’hui la métropole soit un bon échelon pour favoriser l’affirmation économique des territoires. Les collectivités sont alors incitées à « faire métropole ». On pourrait multiplier la liste des « raisons », économiques, politiques, sociales ou encore symboliques qui poussent à ces coopérations. L’objectif de ce premier groupe de fiches sur la coopération n’est pas d’être exhaustif, mais de présenter un certain nombre de motivations à la coopération des territoires ; et nous verrons, que bien souvent, les motivations sont plurielles et conflictuelles. Nous tenterons donc de montrer qu’il n’y a jamais d’ « évidence » à la coopération. Sa nature, ses formes, son périmètre sont toujours révélateurs d’enjeux territoriaux.

Voir les exemples :