Nos villes après la COVID-19: la charte de Leipzig toujours aussi pertinente

Lettre d’information du Comité Européen des Régions

janvier 2021

Comité des Régions (CoR)

Le Comité européen des régions (CdR), intervient à plusieurs étapes au fil du processus législatif de l’Union européenne. Sur la base de propositions législatives européennes, les commissions du CdR élaborent des avis que les membres du CdR réunis en plénière sont appelés à voter et à adopter. Le CdR agit également en étroite coopération avec les pouvoirs nationaux, régionaux et locaux dont il se fait le porte-voix, ainsi qu’en favorisant le débat politique, non seulement à Bruxelles, mais aussi dans les régions et les villes de l’Union, à l’extérieur de l’Europe ou encore sur l’internet.

Dans la lettre d’information du CdR, Juan Espadas (ES/PSE) , maire de Séville et président de la commission ENVE du CdR et du groupe de travail «Pacte vert – Investir l’échelon local» , répond à quatre questions sur la nouvelle charte de Leipzig , un ensemble de principes destiné à guider les villes européennes vers davantage de durabilité, de résilience et d’inclusion. L’avis du CdR sur le renouvellement de la charte de Leipzig a été adopté lors de la session plénière tenue en octobre 2020. Aujourd’hui, la nouvelle charte de Leipzig conserve toute sa pertinence, notamment en ce qui concerne la promotion de la durabilité urbaine après la pandémie de COVID-19.

La pandémie de COVID-19 a mis en évidence la nécessité de développer une mobilité douce ou d’imaginer une nouvelle organisation du travail dans les villes. Ces recommandations sont également conformes aux objectifs de l’accord de Paris et à la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies. Diriez-vous que votre avis sur «le renouvellement de la charte de Leipzig sur la ville européenne durable» est à l’avant-garde lorsqu’il propose de nouvelles stratégies de développement pour les villes à l’ère de l’après-COVID-19 et dans le cadre du plan de relance?

Aussi bien le gouvernement allemand, qui assure la présidence du Conseil de l’UE au cours du second semestre de 2020, que le Comité européen des régions, travaillent sur la nouvelle charte de Leipzig depuis longtemps avant la crise de la COVID-19. En tant qu’élus, nous devons faire en sorte que cette terrible crise devienne une occasion d’améliorer la qualité de vie de tous nos citoyens. Ces dernières années, nous avons considérablement renforcé nos stratégies collectives de lutte contre le changement climatique grâce à des accords internationaux essentiels. Décembre 2020 a ainsi marqué le 5 e anniversaire de l’accord de Paris sur le climat. La nouvelle charte de Leipzig met à jour les besoins des entités urbaines dans le nouveau paradigme mondial. Les villes sont le moteur du changement pour parvenir à un monde plus durable et plus sain. Maintenant que nous sommes parvenus à un accord sur le nouveau budget à long terme de l’UE et sur le plan de relance post-COVID-19, la charte de Leipzig montre qu’elle est toujours aussi pertinente pour guider nos villes vers une nouvelle ère de durabilité, de résilience et d’inclusion.

Votre avis met l’accent sur le partenariat nécessaire que l’UE doit établir avec les villes européennes si elle veut atteindre les objectifs du pacte vert pour l’Europe. Pensez-vous que les collectivités locales et régionales sont suffisamment associées à la mise en œuvre du plan de relance «Next Generation UE»? Les fonds alloués aux régions et aux villes pour développer des villes durables – dans des régions durables – seront-ils suffisants pour mettre en œuvre les transitions verte et numérique en Europe sans laisser personne de côté?

Premièrement, nous devons garder à l’esprit que chaque État membre de l’UE dispose de sa propre architecture administrative. Dès lors, il est assez complexe d’évaluer la participation exacte des collectivités locales et régionales dans chaque domaine d’action de l’UE. Il ne fait aucun doute que le Comité européen des régions est le forum qui relaie la contribution des villes et des régions à l’élaboration des politiques de l’UE, et en particulier de «Next Generation EU» , le plan de relance visant à surmonter les conséquences sociales et économiques dramatiques de la COVID-19. Nous ne devons pas oublier que les villes sont les entités les plus proches des citoyens, et celles qui devront mettre en œuvre la plupart des mesures de relance. Les collectivités locales – et régionales – doivent donc être au cœur de la conception des plans de relance et des investissements prioritaires. Au début de l’année 2020, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a défini ses priorités, plaçant en tête le pacte vert pour l’Europe, la nouvelle stratégie de croissance de l’Union visant à atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050. Toutes les politiques de l’UE doivent être conformes aux principes et aux objectifs de ce pacte vert. Nous ne pouvons pas regarder en arrière. L’avenir sera vert ou ne sera pas. Le rôle des villes sera décisif pour atteindre cet objectif.

La COVID-19 a également mis en évidence les interdépendances entre les zones urbaines et rurales, notamment en ce qui concerne l’organisation des systèmes alimentaires en Europe. Que proposez-vous, dans votre avis du CdR, pour renforcer la coopération entre ces zones, dans le but de mieux réaliser les objectifs de la politique de cohésion, du pacte vert ou de la stratégie «De la ferme à la table»?

Nous devons renforcer la coopération entre les zones urbaines et rurales si nous voulons construire des villes plus durables. La coopération en matière de production et de consommation alimentaires est un facteur clé. La promotion de la consommation d’aliments produits à proximité des zones urbaines contribuera non seulement à la durabilité de nos systèmes alimentaires, mais aussi à l’amélioration de notre santé. Je pense que nous devons également souligner l’importance des zones métropolitaines, car nous ne pouvons pas comprendre le fonctionnement des villes sans tenir compte des zones métropolitaines qui les entourent: elles doivent travailler toutes ensemble pour une utilisation plus efficace des ressources dans les villes.

La Commission européenne met en avant son initiative visant à promouvoir une «amélioration de la réglementation». Que proposez-vous dans ce domaine? Pensez-vous qu’il serait nécessaire de réformer le Semestre européen afin de mieux tenir compte des régions et des villes, des objectifs de la politique de cohésion et de la mise en œuvre du pacte vert pour l’Europe?

Tout d’abord, je tiens à préciser que l’amélioration de la réglementation ne signifie pas une déréglementation. En effet, l’Europe doit aujourd’hui être plus efficace et la pandémie de COVID-19 a joué un rôle révélateur à cet égard. La seule manière d’atteindre cet objectif est de renforcer la coopération et la coordination entre les différents niveaux de gouvernement, à savoir les niveaux européen et national, mais aussi régional et local. C’est incontestablement la première étape pour améliorer la réglementation! Par exemple, le Semestre européen, le processus européen qui formule chaque année des recommandations économiques spécifiques pour les États membres de l’UE, ne peut rester un exercice purement bureaucratique sans contrôle démocratique et sans ancrage dans les régions européennes. C’est pourquoi, au sein du Comité européen des régions, nous souhaitons que les régions et les villes participent officiellement à l’élaboration de ces recommandations. Nous demandons également que le Parlement européen soit habilité à exercer pleinement son rôle en matière de contrôle démocratique, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. En outre, d’un point de vue thématique, on pourrait se demander pourquoi les recommandations en matière d’investissements publics, de solidarité ou d’objectifs de développement durable étaient, jusqu’à récemment, absentes des indications spécifiques du Semestre européen, en particulier alors que la crise actuelle nous montre à quel point cela serait utile. Nous devons changer cette approche pour nous adapter et répondre aux besoins concrets de nos citoyens et de nos territoires. C’est le seul moyen de mettre en œuvre le pacte vert pour l’Europe sans laisser personne de côté.

Contexte:

Adoptée au cours de la présidence allemande du Conseil de l’UE en 2007, la charte de Leipzig sur la ville européenne durable a contribué à définir le concept de développement urbain intégré à l’échelle de l’UE et a joué un rôle déterminant dans l’élaboration d’initiatives de l’Union telles que le programme urbain. La nouvelle charte de Leipzig a été adoptée lors de la réunion informelle des ministres chargés du développement urbain et territorial tenue le 30 novembre 2020.

Cette nouvelle version examine les conséquences des pandémies sur les villes et l’augmentation potentielle des disparités territoriales qui en découle. Le nouveau texte soutient les principes d’une approche intégrée, territorialisée et à plusieurs niveaux de gouvernance. La charte renouvelée reconnaît que les zones rurales environnantes présentent des avantages importants pour les villes. Elle admet expressément qu’il importe de promouvoir la «cohésion numérique» en Europe, tant pour ses citoyens que pour ses territoires. La nouvelle charte de Leipzig reconnaît la validité des trois piliers du programme urbain de l’UE («Mieux légiférer», «Mieux financer» et «Mieux partager les connaissances»), définis dans le pacte d’Amsterdam. Au cours du second semestre de 2020, la présidence allemande du Conseil de l’UE a suivi la recommandation du CdR de formuler des conclusions concernant la charte de Leipzig, le programme urbain de l’UE et son lien avec l’agenda territorial de l’UE, qui ont été présentées et adoptées par les ministres du Conseil «Environnement» le 17 décembre 2020.

Références

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