Femmes et gestion des déchets urbains

L’expérience de la COFESFA au Mali

Djibril GUEYE, février 1998

Dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale (DPH)

Cette fiche a été réalisée au cours de la rencontre à Dakar qui a réuni en février 1998 des habitants, des élus, des techniciens des villes de onze pays d’Afrique (Ouest et Cameroun), à partir d’un entretien avec Diarra ASSETOU SIDIBE. Elle décrit la création de la COFESFA (coopérative des femmes pour l’éducation, la santé familiale et l’assainissement) par un groupe de femmes et la manière dont elles ont développé leur activité de collecte des déchets.

La coopérative des femmes pour l’éducation, la santé familiale et l’assainissement (COFESFA) est l’histoire de 16 femmes diplômées sans emploi qui ont réussi leur insertion professionnelle dans le domaine de l’assainissement à Bamako au Mali.

L’une des première activités ciblées étaient la pré-collecte des ordures ménagères parce qu’elles pouvaient leur permettre de se rapprocher des ménages et surtout des femmes.

L’idée de la création de cette structure émane de Mme Aminata Traoré, Consultante à l’Unifem (Fonds des Nations Unies pour la Femme). Par le biais de ses relations dans l’institution, elle est parvenue à leur trouver une subvention pour deux camions pour leur permettre de démarrer les premières activités. Celles-ci devraient se faire moyennant une contribution de 25 Francs CFA par ménage et par enlèvement.

Mais l’État leur a demandé de ne pas faire payer les populations parce qu’elles s’acquittaient déjà de la taxe sur les ordures ménagères. Alors l’État leur a demandé de déposer une étude de faisabilité sur un quartier test et ensuite de verser une caution de 3.000.000 Francs CFA pour l’exécution d’un contrat de 9.000.000 Francs CFA.

Pour réunir cette somme, la COFESFA s’est lancée dans le transport de sable avec ses deux camions.

Une fois le montant de la caution atteint, la COFESFA et l’État ont signé un protocole de partenariat de 9.000.000 Francs CFA sur une période d’une année qui stipulait que l’État verserait cette somme suivant un décaissement de 30%, 50%, 20% et que la COFESFA ramasserait les ordures sans demander aux populations de participer.

La collecte a démarré à Médina Gounass en 1990. Le système de ramassage consistait pour les chauffeurs de camions à sillonner le quartier en s’arrêtant à des points précis où les femmes et les domestiques leur portaient les poubelles remplies d’ordures.

Deux coopérateurs qui étaient près du camion étaient chargés du suivi et du contrôle.

Après une année d’exécution, les résultats étaient très satisfaisants, mais le renouvellement du contrat devait buter sur des blocages administratifs et financiers. A tel point que le système de ramassage à Médina Gounass a dû être interrompu en février 1992, l’avance pour le démarrage étant perçu avec huit mois de retard par la COFESFA.

Ses membres ont cependant persévéré en exploitant toutes les opportunités qui pouvaient leur permettre d’assurer un revenu et de se maintenir dans le secteur.

Aussi, la promotion des poubelles fermées s’imposait à la fois comme une activité complémentaire à la collecte des ordures et comme source de revenus. Les populations utilisaient auparavant de vieux seaux, bassines et paniers.

La COFESFA a mis à contribution les artisans locaux dans la confection d’un premier type de poubelle d’une capacité de 33 litres. Par la suite, sur la demande des femmes, des poubelles d’une capacité de 49 litres et 66 litres ont été mis sur le marché. Au total, 727 poubelles ont été confectionnées et vendues pour un prix de revient de 2.094.250 Francs CFA.

Parallèlement, la COFESFA s’est lancée dans la construction de latrines publiques qui sont relativement rentables.

L’activité de sensibilisation et de formation Santé Maternelle et Infantile / Planification Familiale a aussi été lancée parallèlement à l’activité de collecte.

696 séances de travail à raison de 15 personnes par séance ont été touchées sur des thèmes tels la santé infantile, l’hygiène de l’habitat, les maladies diarrhéiques etc.

Commentaire :

L’effet de la réussite de la COFESFA a fait tâche d’huile au Mali. C’est ainsi que des dizaines de jeunes maliens et maliennes, diplômées sans emploi, n’ont pas hésité ces dernières années à se regrouper sous forme de GIE (Groupement d’Intérêt Économique) pour la collecte des ordures.

Ces jeunes jouent actuellement un rôle considérable dans la recherche de solutions pour résoudre le problème de l’insalubrité à Bamako. Selon l’ancien directeur de la voirie, Joseph Marie Diana, il est impossible de résoudre le problème de la pré-collecte au Mali sans passer par les GIE.

Références

CADU (Centre Africain de Développement Urbain) - BP 15339 Dakar - Fann Sénégal, Boulevard du Sud, Villa n°9 Dakar

WADE M. Février 1998. Développement et sécurité en Afrique : la démarche du CADU. Centre Africain de Développement Urbain

En savoir plus

Initiatives locales de développement urbain : lutte contre l’insalubrité et la prolifération des ordures ménagères

Traore A. D. mars 1996. Femmes africaines et gestion des déchets urbains, Fonds de développement des nations unis pour la femme

Voici un petit film retraçant l’expérience d’Anne Majerus auprès de l’organisation COFESFA, partenaire de la FFL au Mali. Réalisation du film : Terry Winn film, fondation Follereau.

Di Biase A. 2006. Gestion des déchets ménagers solides à Bamako, rôle et pouvoir des acteurs, Université de Genève, PSEAU.