Création et management d’une entreprise à but d’emploi : gros plan sur l’expérience de Pipriac et Saint-Ganton

Séminaire Vie des affaires - association des amis de l’EDP -

denis PROST, Serge MARHIC, Clémentine HODEAU, mayo 2019

École de Paris du management

Un territoire rural en Bretagne, des exclus du travail, des besoins locaux non pris en compte et un fort consensus autour d’une idée simple : le travail est un droit dont chacun doit pouvoir disposer. Sous l’impulsion de l’association ATD Quart Monde, un projet va donc voir le jour, porté par des élus, des entrepreneurs, des travailleurs sociaux ou des bénévoles : plus un chômeur de longue durée ne doit rester désormais sans emploi sur leur territoire. Pour cela, les fonds alloués à ces personnes au titre de l’allocation chômage ou du revenu de solidarité active, et plus largement tous les coûts et manques à gagner liés au chômage, vont être réorientés vers une entreprise à but d’emploi. À charge pour elle de leur garantir un CDI et une activité utile à la collectivité, quelles que soient leurs compétences. Cette expérimentation est désormais appuyée sur une loi permettant de valider la méthode, et les premiers résultats obtenus laissent bien augurer d’une pérennisation du dispositif et de son extension à d’autres territoires.

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Création et management d’une entreprise à but d’emploi : gros plan sur l’expérience de Pipriac et Saint-Ganton

Personne n’est inemployable

Le projet Territoires zéro chômeur de longue durée est né, dans les années 1990, d’une idée de Patrick Valentin 1, un entrepreneur social travaillant avec de nombreuses personnes privées d’emploi, qu’il s’agisse de personnes handicapées ou de chômeurs de longue durée. Implanté dans une petite commune, il y constate que le coût de la privation d’emploi, pris en charge par la société, devrait pouvoir être réorienté afin de produire des emplois répondant à des besoins de la population. Laisser l’idée faire son chemin, puis définir le cadre légal permettant de la mettre en œuvre prendra quelque temps. Finalement, grâce à la mobilisation du mouvement ATD Quart Monde et à la volonté de Laurent Grandguillaume 2 de porter une proposition de loi d’expérimentation, celle-ci sera votée à l’unanimité par les deux chambres en février 2016. Cette loi d’expérimentation prévoit que, pendant cinq années, la contribution au développement de l’emploi versée aux entreprises à but d’emploi (EBE) le soit par le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, qui recueille l’ensemble des financements nécessaires à la mise en oeuvre de cette expérimentation. Ces fonds peuvent provenir de l’État, des conseils départementaux et régionaux, des communautés de communes volontaires entrées dans l’expérimentation et des organismes publics et privés volontaires. Une expérimentation sur dix petits territoires a alors pu être lancée dans le cadre du projet Territoires zéro chômeur de longue durée. Pour cela, nous sommes partis de trois grandes hypothèses.

La première est que personne n’est inemployable, car l’employabilité dépend des conditions d’organisation du travail.

La deuxième est que ce n’est pas le travail qui manque. L’on constate en effet, lorsque l’on se rend dans les territoires, qu’il existe quantité de travaux utiles à réaliser pouvant être transformés en emplois.

La troisième de ces hypothèses est que ce n’est pas l’argent qui manque, l’étude macroéconomique nationale menée par ATD Quart Monde ayant mis en évidence le coût pour la collectivité nationale de la privation d’emploi et de l’exclusion. Le pari de cette expérimentation est de pouvoir activer et réorienter ce budget afin de permettre aux personnes concernées de sortir de la privation d’emploi.

Nous proposons à tous les chômeurs de longue durée volontaires, privés d’emploi depuis plus d’un an et habitant depuis plus de six mois sur le territoire, un contrat à durée indéterminée (CDI), à temps choisi, rémunéré au SMIC, pour un travail reposant sur les besoins du territoire et prenant en compte les capacités de la personne. Cette démarche se déploie en trois étapes.

• La première d’entre elles est une étape de fabrication du consensus, afin de faire en sorte que sur un territoire donné, toutes les personnes présentes, actives et concernées puissent se mobiliser et décider ensemble d’agir pour y supprimer la privation d’emploi. Cela concerne aussi bien les élus, les chefs d’entreprise, les personnes privées d’emploi, les associations locales, les acteurs de l’emploi, que les simples citoyens qui partagent cette ambition.

• La deuxième étape est celle de la rencontre avec les personnes privées d’emploi. Elle vise à identifier ce qu’elles ont envie de faire ou savent déjà faire, et ce qu’elles sont prêtes à apprendre afin de mettre en oeuvre des travaux utiles qui seront repérés lors de l’étape suivante.

• La troisième étape consiste donc à rechercher, avec les personnes privées d’emploi et les acteurs locaux (collectivités, entreprises, associations locales), tous les travaux utiles à réaliser sur le territoire, avec pour objectif de satisfaire les besoins des populations. Il s’agit ensuite de faire correspondre les compétences et les capacités des personnes concernées avec ces travaux.

À l’issue de cette expérimentation d’une durée de cinq ans, l’enjeu sera d’avoir identifié, sur un territoire donné, le coût de la production des emplois nécessaires à la population locale. Cette expérimentation consiste donc en la validation de la méthodologie et en l’identification de ce coût afin de préparer une seconde étape expérimentale. Celle-ci, en tirant les leçons de la première expérience, devra la prolonger et l’amplifier sur un plus grand nombre de territoires avant un déploiement, si les résultats sont concluants, sur tous les territoires volontaires.

Exposé de Denis Prost

Un projet viable

Notre territoire recouvre deux communes : Pipriac, ancien chef-lieu de canton de 3 700 habitants, et Saint- Ganton, un village de 425 habitants. Pour développer l’intelligence collective, il est intéressant d’avoir deux communes présentant des situations différentes. Sur ce territoire, à l’époque où le projet a démarré, 170 personnes étaient inscrites sur les listes de demandeurs d’emploi de longue durée de Pôle emploi, pour un taux de chômage global d’environ 10 %.

Notre projet n’est pas un dispositif que l’on peut plaquer sur un territoire et administrer de façon indifférenciée. Les témoignages montrent que, petit à petit, un lien se crée entre élus, chefs d’entreprise et chercheurs d’emploi. Le carburant de ce projet est en effet la mobilisation des acteurs d’un territoire qui se saisissent de l’objectif du plein emploi volontaire sur leur lieu de vie. Cela explique que nous nous soyons préparés durant deux ans et demi avec eux avant d’ouvrir l’entreprise à but d’emploi. Il est également important de comprendre que, par nature, ce type de projet ne peut se développer que sur des territoires à taille humaine, car il faut se situer à une échelle où l’on se connaît, où l’on peut, s’il y a des soucis de concurrence ou des inquiétudes du côté des entreprises, en parler et trouver des solutions.

Nous avons démarré en juin 2014 et nous étions alors le premier territoire en France à nous lancer dans cette expérimentation. Avec une petite équipe réunie autour du Point Accueil Emploi de Pipriac, dont le président était un conseiller départemental très motivé par le projet, nous sommes partis dans l’inconnu, sans savoir si une loi – qui ne sera effectivement votée qu’en février 2016 – viendrait nous épauler. À cette époque, cela faisait trois ans qu’ATD Quart Monde avait lancé l’idée sans que personne ne passe à l’acte. Avec les chômeurs du territoire, nous avons donc fait le pari d’avancer sans la moindre visibilité en nous disant que, quoi qu’il en soit, nous n’avions rien à perdre. Finalement, trois autres territoires se sont aussi lancés, ce qui a contribué en grande partie à l’obtention de cette loi, en lui donnant du contenu et en montrant que cette idée était viable. Durant les six premiers mois, nous avons rencontré des entreprises, des élus, qui sont les porteurs politiques du projet, et des responsables associatifs afin de “sentir” si ce territoire avait envie de se lancer. Nous nous sommes d’abord heurtés, lors de la première réunion, à un tir de barrage des entreprises craignant une concurrence déloyale et un nouveau surcoût pour les finances publiques. Il a donc fallu être pédagogues et prendre le temps de bien nous expliquer, conditions indispensables pour une mobilisation territoriale. Aux moments collectifs, il a fallu adjoindre des rencontres en tête-à-tête, beaucoup plus impliquantes, avec tel ou tel chef d’entreprise, afin de comprendre sa position et dissiper ses craintes. Dans un deuxième temps, de novembre 2014 à mars 2015, nous avons rencontré les personnes privées d’emploi. Nous avons procédé à l’inverse d’une entreprise classique qui part des compétences dont elle a besoin pour recruter un nouvel employé. Notre objectif étant de donner du travail à tout le monde, nous sommes partis des individus pour leur trouver un emploi qui leur corresponde. Parmi eux, par exemple, se trouvaient deux couturières ; nous avons ainsi été amenés à créer une activité autour de tissus recyclés, alors que nous ne l’aurions sans doute pas imaginée en l’absence de ces personnes. À l’issue de cette période, nous avions rencontré environ 120 personnes privées d’emploi et motivées pour travailler, ce qui nous a permis de revenir avec des arguments vers les chefs d’entreprise qui doutaient de notre capacité à mobiliser significativement des chômeurs. Il y avait des barrières mentales et culturelles à faire sauter, aussi bien sur les questions de motivation au travail des personnes privées d’emploi que sur la réalité d’un gisement de travail inexploré. Subitement, une ressource humaine inattendue est apparue et, parallèlement, des idées de travaux utiles pour le territoire ont également surgi chez ces personnes, dès lors qu’elles se sont senties parties prenantes du projet. Sur cette période, une centaine de réunions, menées avec les différents acteurs, ont fait émerger une quinzaine de thèmes d’activités envisageables. Le projet n’a donc pas été réalisé pour les personnes privées d’emploi, mais avec elles et grâce à leurs contributions.

Une fois tout cela accompli, durant la troisième étape, nous avons rencontré les élus et les chefs d’entreprise en leur posant une simple question : « Si vous oubliez la question de l’argent, qu’est-ce qu’il y a d’utile à faire ? » Il est en effet fondamental, dans un tel projet, de ne pas mettre l’aspect financier en avant, sauf à tout bloquer immédiatement. Fin 2015, plus de 300 idées réalistes sont ainsi sorties de ces rencontres.

En parallèle, en 2015, nous avions manifesté à Paris : nous avions fait une “grève du chômage” durant laquelle des chômeurs avaient, bénévolement, effectué quantité de travaux utiles sur le territoire afin de montrer leurs compétences et prouver la pertinence du projet, le tout avec une couverture médiatique nationale. Le projet de loi avait progressé et nous avions pour perspective qu’elle soit votée en 2016. Nous avons alors décidé d’engager le futur dirigeant de l’entreprise à but d’emploi (EBE) et de créer cette entité atypique, puisque nous démarrions en ayant déjà nos salariés, mais sans encore avoir nos activités. L’entreprise TEZEA a ouvert en janvier 2017.

Or, si l’entreprise fonctionne désormais, tout un travail reste à faire autour d’elle. Elle n’est en effet qu’un outil au service d’un projet de territoire qui doit être porté par le comité local, présidé par les deux maires et mis en œuvre par une équipe projet qui en est la cheville ouvrière et dont je suis responsable. Cette équipe doit faire tout ce qui est nécessaire à la réussite de l’expérimentation, ce qui l’amène à assurer de nombreuses missions sur le territoire, missions réunies sous le terme d’animation territoriale.

Exposé de Serge Marhic

À la recherche des potentiels

Avant de devenir directeur de TEZEA, j’étais éducateur spécialisé, engagé d’abord à Rennes auprès de femmes victimes de violences conjugales, puis directeur d’association. Notre entreprise a but d’emploi n’a rien de classique. Nous ne choisissons pas nos salariés et nous n’en connaissons pas les compétences effectives lorsque nous les accueillons. Nos activités ne nous permettent pas de développer librement notre chiffre d’affaires puisque nous sommes liés par des engagements de non concurrence, que nous sommes confinés sur un territoire restreint, etc. Ce territoire est très rural et éloigné des villes – il est situé à 50 kilomètres de Rennes, 80 kilomètres de Nantes et 70 kilomètres de Vannes. La population est à 70 % issue du monde agricole. Les plus grosses entreprises à proximité sont PSA, à Rennes, et Yves Rocher, à La Gacilly – à 10 kilomètres de nous. À Pipriac, il y a trois entreprises de plus de 100 salariés, ce qui nous classe, depuis que nous avons franchi le cap de 75 salariés, parmi les plus gros employeurs locaux. Nous devrions atteindre les 100 salariés dans le courant de l’année 2019.

Notre principe est que toutes les personnes qui frappent à la porte de l’entreprise peuvent y entrer. Nous réfléchissons ensuite, avec ces futurs salariés et les entreprises partenaires sur le territoire, à une activité en lien avec ce que les personnes disent savoir ou avoir envie de faire. Cette activité doit être compatible avec les contraintes de gestion, car nous ne pouvons bien évidemment pas investir inconsidérément sans nous être assurés d’avoir un débouché sur le marché. Nous sommes donc souvent considérés par les autres chefs d’entreprise comme une entreprise classique avec, comme eux, des contraintes de gestion, des exigences de productivité, des horaires établis, un savoir-faire, etc.

Le fait de recruter des personnes issues de tous les milieux nous confronte à des attentes et des problématiques très différentes : 35 % d’entre elles sont en reconnaissance de handicap (RQTH) ; une vingtaine n’a pas le permis de conduire et a donc un gros problème de mobilité ; d’autres sont privées d’emploi depuis très longtemps ou ont des problématiques personnelles liées à l’alcool ou aux stupéfiants, etc. Cela fait une différence notable avec le monde de l’insertion qui doit parfois sélectionner pour construire ses effectifs en fonction de ses activités. Clairement, nous, nous ne choisissons pas.

Clémentine HODEAU : Au niveau national, le profil des salariés des EBE indique un âge moyen de 44 ans, plus de 53 mois de privation d’emploi, un niveau de formation 5 ou 6, c’est-à-dire inférieur ou égal au CAP. On estime que 30 à 40 % d’entre eux ont un statut de travailleur handicapé (reconnu ou non) et autant d’hommes que de femmes sont concernés.

Serge MARHIC : Leur palette de compétences est néanmoins étonnante et nous rencontrons parfois des gens qui savent tout faire. La ressource qui émerge ainsi est formidable alors qu’elle reste inutilisée sur des territoires où il y a tant de choses à faire. À partir de 2016, nous avons passé une année à essayer de construire nos premières activités en intégrant toutes ces contraintes. À cette époque, nous ne raisonnions pas en jours de travail à trouver, mais en heures : un quart d’heure pour faire les sorties d’école, une heure pour faire du désherbage manuel sur les trottoirs, une autre pour le ramassage de déchets sauvages, etc. En conséquence, nous avions peu d’heures d’activité, donc peu de financements, puisqu’ils sont conditionnés par l’activité générée. En raison du faible niveau de compétences spécialisées de notre population, nous ne pouvions pas répondre à des besoins internes dans des domaines comme la comptabilité ou la planification. Il était aussi possible que nous soyons en déficit de compétences disponibles dans un territoire voisin, ou inversement. Bien qu’il soit toujours possible à une EBE d’embaucher qui elle veut, par exemple un comptable ou un commercial qui ne soient pas chômeurs, le faire serait néanmoins une dérive qui aurait un coût non couvert par le dispositif et nous écarterait de notre finalité première qui est de valoriser au maximum les compétences présentes sur le territoire.

À Pipriac et Saint-Ganton, nous avons fait le choix de nous dire que, forcément, sur le territoire, quelqu’un privé d’emploi et désireux de monter en compétences allait venir vers nous. Et effectivement, sur les 120 entretiens que nous avons menés, interrogeant les postulants sur leur expérience avec les chiffres ou les tableurs, une personne nous a répondu qu’elle gérait les comptes d’une petite association depuis une dizaine d’années. C’était gagné, nous avions trouvé notre première comptable ! Au fil du temps, d’autres compétences sont arrivées qui ont pris son relais pour accompagner la croissance de l’entreprise. Il en est allé de même pour le commercial et pour la personne à l’accueil pour qui nous avons fait le pari de cette montée en puissance. On a toujours un potentiel, encore faut-il aller le chercher !

Cinq sites, chacun ayant une thématique particulière, accueillent désormais notre trentaine d’activités. Celles-ci sont de tailles variables, les principales occupant en moyenne une dizaine de personnes, d’autres, plus périphériques, pouvant ne représenter qu’un temps partiel. La plus importante, qui emploie une vingtaine de personnes, touche tout ce qui concerne le bois et les palettes à travers leur réparation ou leur transformation, et propose une gamme de services allant du ponçage à la livraison. Notre blanchisserie et notre stock de matériel, centralisés dans le bourg de Pipriac, sont également des activités importantes. À côté d’elles, nous avons des activités annexes comme le tri des métaux, le nettoyage de véhicules, la livraison, le commerce ambulant, la collecte des tissus et leur recyclage, ainsi que les fonctions support et la direction, classiques dans toute entreprise. Chaque activité a son responsable.

Au sein de chacun de ces sites, il fallait assurer l’encadrement des équipes, suivre les investissements et les ventes, adapter les machines aux activités, etc., ce que mon collègue et moi ne pouvions faire seuls. Nous nous sommes alors dit que, parmi les profils présents, nous devrions sûrement trouver des personnes capables de monter en compétences afin d’assurer ce suivi. Nous avons fait le choix de donner à ces responsables le même statut de salarié polyvalent, au même niveau salarial que les autres, avec une fiche de poste spécifique. Nous leur avons expliqué qu’ils étaient là pour monter en compétence dans cette fonction et qu’une fois cette compétence acquise, ils pourraient postuler à d’autres postes, au sein de TEZEA ou à l’extérieur. Tous contribuent à atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés. Le premier est de créer une structure qui n’exclue personne. Nous imposons à nos responsables qu’aucune personne ne soit mise à l’écart au motif qu’elle éprouve des difficultés, physiques ou autres, dans une activité, car ils doivent faire en sorte de l’intégrer dans leur équipe. Le deuxième objectif est évidemment de produire et d’avoir un chiffre d’affaires minimum.

Nous sommes donc toujours en recherche de nouvelles activités, qui ne soient ni existantes ni concurrentielles, utiles au territoire et en lien avec les compétences des salariés.

Debat

Un premier pas vers le plein emploi

Un intervenant : Sur quels critères jugez-vous la privation d’emploi ?

Denis Prost : Lorsque nous avons débuté, il y avait 170 personnes qui émargeaient depuis plus d’un an sur les listes de Pôle emploi. Cependant, parmi elles, certaines travaillaient régulièrement en intérim ou en CDD et n’étaient donc pas réellement privées d’emploi. Elles relevaient de ce que l’on appelle le chômage frictionnel. Notre définition de la notion de privation d’emploi est donc sensiblement différente de celle de l’Administration. Celle que nous retenons correspond à la situation vécue par les personnes qui voudraient retravailler ou travailler plus et qui n’y parviennent pas depuis au moins un an. C’est donc une réalité objective, car c’est à partir de ce moment-là que leur situation devient critique, qu’elles soient inscrites à Pôle emploi ou complètement “hors radars”, n’apparaissant sur aucune liste. Nous les intégrons alors d’emblée, car nous travaillons en nous référant à la notion de droit à l’emploi et, bien qu’il soit souvent difficile d’identifier les personnes qui ne sont plus inscrites à Pôle emploi, nous les ciblons en priorité afin de leur éviter de rester dans l’exclusion et la précarité. Nous travaillons beaucoup avec les travailleurs sociaux, mais certains, parfois, ont du mal à comprendre notre démarche envers des gens qu’ils jugent totalement inaptes à une quelconque activité professionnelle, ce qui nous empêche alors d’identifier ces derniers. Depuis cinq ans que nous existons, nous savons donc qu’il reste encore des gens que nous n’avons pas réussi à toucher.

Clémentine Hodeau : Il y a deux territoires, celui de Mauléon et celui de Pipriac et de Saint-Ganton, dans lesquels nous approchons de l’exhaustivité. Nous avons touché les 85 volontaires qui se sont exprimés jusqu’à présent, ce qui contribue largement à faire exister le droit à l’emploi sur le territoire. Désormais, nous poursuivons l’animation afin de rendre accessible le projet à tous ceux qui ne se sont pas encore prononcés, mais qui peuvent demain se sentir intéressés. C’est donc une phase importante que nous abordons et un premier pas vers le plein emploi effectif.

Int. : La peur de l’échec n’est-elle pas le principal frein au retour à l’emploi ?

Serge Marhic : Souvent, les personnes ne veulent pas prendre le risque d’un échec de plus alors qu’elles en ont déjà beaucoup vécus. Lors de la phase où nous rencontrons les personnes privées d’emploi, nous essayons de leur faire prendre conscience que, contrairement à ce qu’elles croient, elles savent faire des choses. Les diplômes ou les qualifications n’ont pas d’intérêt dans ce cadre-là : ce qui compte, c’est ce qu’elles peuvent réellement faire. Il s’agit de leur faire comprendre que leur situation n’est pas sans espoir. Leurs interlocuteurs habituels ne voient souvent en elles que des problèmes à résoudre ; au contraire, nous y voyons une ressource. Cet entretien, lors duquel nous mettons en valeur ce qu’elles savent concrètement faire, leur fait un bien fou. Certaines personnes ont même retrouvé du travail rapidement sans intégrer TEZEA, uniquement parce qu’elles avaient été revalorisées par cet épisode.

Le vrai coût du chômage

Int. : Comment calculez-vous le prix de vos prestations ?

S. M. : Nous ne faisons pas concurrence aux autres entreprises, donc nous n’avons pas de marché face à nous. Nous établissons notre prévisionnel en fonction de nos effectifs, des investissements dont nous avons besoin et des charges d’encadrement et de direction. En face, le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée nous reverse le coût du chômage. Il nous reste alors une part qu’il nous faut compléter et qui varie entre 5 000 et 8 000 euros par emploi à temps plein et par an. Chaque prestation est évaluée en fonction de sa nature, du nombre de personnes qu’elle sollicite, de la quantité d’heures qu’elle demande, du coût engendré par l’utilisation du matériel et, secondairement, des pratiques du marché. Aujourd’hui, pour notre service de livraisons, par exemple, nous facturons des coûts horaires fixes. Pour du lavage de véhicule, nous regardons le temps passé, le coût des produits et, n’ayant pas besoin de faire de marge outre mesure, nous nous renseignons sur Internet sur les prix du marché afin de nous positionner au mieux. Alors que les entreprises évaluent généralement le montant d’une prestation sur la base du coût horaire, nous les facturons souvent forfaitairement, car nous voulons garder la main sur les conditions de réalisation de la prestation, quel que soit le temps mis pour la mener à bien ou le nombre de personnes qui y sont affectées.

D. P. : La particularité de notre approche est que nous privilégions toujours le travail et l’emploi. Si nous sentons, chez certains clients, que pour débloquer la quantité de travail qui nous intéresse il nous faut baisser le tarif, nous le baisserons, car notre enjeu prioritaire est l’emploi et non les finances.

C. H. : Le modèle économique d’une EBE est mixte, en équilibre entre l’argent jusqu’alors alloué par l’État, les régions et les départements pour accompagner ces personnes privées d’emploi et qui nous est désormais reversé, et la nécessité pour l’entreprise de dégager des ressources propres tout en produisant de l’emploi.

D. P. : Notre curseur est le coût du chômage de longue durée, qui est susceptible d’évoluer. Aujourd’hui, l’étude d’ATD Quart Monde, réactualisée en 2017, le situe a minima entre 16 000 et 19 000 euros par personne, par an et pour un temps plein. Cependant, cette étude n’intègre pas tout : l’impact sur les recettes de l’impôt sur le revenu et les impacts indirects sur l’économie du retour à l’emploi d’une personne n’ont pas été pris en compte, à l’exception du gain de pouvoir d’achat des salariés et de son impact sur la TVA. De plus, l’étude d’ATD Quart Monde a été modeste sur l’évaluation de certains coûts, en particulier en ce qui concerne la protection de l’enfance ou de la santé, les coûts liés à la précarité de certaines familles étant très élevés. Nous avons ainsi eu l’exemple d’une salariée qui a récupéré la garde de ses enfants, car le fait qu’il y ait désormais deux CDI dans la famille a complètement changé le regard du juge sur la situation. Pour avoir beaucoup travaillé sur cette étude, je suis persuadé que le coût réel du chômage est plutôt situé entre 20 000 et 25 000 euros, en étant probablement plus proche des 25 000 euros. Le modèle économique qui prime dans cette expérimentation n’est pas celui de l’entreprise, mais celui du projet : est-ce que les bénéfices de la collectivité dans son ensemble – État, régions, départements, organismes publics divers… – liés à la reprise d’emploi sont supérieurs à ce qu’elle verse à l’EBE au titre du coût du chômage longue durée ? C’est à l’intérieur de ce modèle économique que l’on peut dégager des marges pour faire face à toutes nos contraintes et financer l’emploi dans l’EBE.

C. H. : Nous avons obtenu qu’une mission conjointe de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale des finances vérifie le bien-fondé de nos calculs et nous attendons son retour avec impatience.

Int. : Êtes-vous assurés de la pérennité de votre mode de financement ?

D. P. : Pour l’instant, nous sommes encore dans une phase d’expérimentation de cinq ans, mais nous sommes bien dans une logique de financement pérenne, car le coût du chômage de longue durée est également un coût pérenne. Le modèle économique que nous proposons à la collectivité est donc tout à fait défendable.

S. M. : Notre rôle est aussi d’augmenter notre chiffre d’affaires grâce à nos activités, et si notre autofinancement s’accroît, nous serons les premiers à renégocier à la baisse le financement par le Fonds.

Int. : La rémunération au SMIC est-elle intangible ?

D. P. : Si à Pipriac et Saint-Ganton nous sommes attachés à une rémunération au SMIC, ce qui n’est pas le cas de toutes les EBE, c’est que nous sommes très en lien avec les entreprises locales et, en cela, soumis à leur regard et à l’idée qu’elles se font du projet. Comme beaucoup de ces entreprises locales ne paient leurs salariés qu’au SMIC, il n’est pas envisageable qu’il soit plus confortable pour nos salariés de rester au sein de TEZEA plutôt que d’obtenir un CDI moins bien rémunéré ailleurs, fut-ce dans un emploi plus intéressant. Des salaires au-dessus du SMIC seraient un frein supplémentaire à leur sortie de notre dispositif.

Int. : Face à votre modèle de salariat subventionné qui se substitue au chômage, il y a un autre modèle, potentiellement concurrentiel pour le type d’activités que vous offrez, celui des plateformes numériques utilisant des travailleurs pauvres. Plutôt qu’au coût du chômage, n’est-il pas plus pertinent de vous référer au coût d’un travailleur pauvre ?

S. M. : Nos activités sont basées sur le terrain, la proximité et le lien social, modèle que nous défendons fermement. Cela nous met relativement à l’abri de ce type de concurrence.

D. P. : J’ajouterai que, sur notre territoire, nous épuisons le vivier des personnes susceptibles d’être exploitées par des plateformes utilisant une main d’oeuvre à bas coût dans des conditions de précarité. Le CDI induit une stabilité qui a des effets extraordinaires chez ces personnes et leur entourage, et leur permet de s’offrir des petits plaisirs, partir en vacances ou accéder à un crédit, toutes choses difficilement accessibles quand vous travaillez pour une plateforme.

Une entreprise comme les autres…

Int. :Comment légitimez-vous les fonctions de responsable qui instituent de fait une forme de hiérarchie ?

S. M. : Nous sommes en pleine réflexion sur ce point. Personnellement, je ne suis pas favorable à une reconnaissance financière de leur fonction, qui viendrait mettre en péril l’ensemble de la structure. On connaît les enjeux et les risques que cela crée dans les entreprises classiques dès lors que l’on estime qu’un tel ou un tel mérite plus. Nos responsables font certes un peu plus qu’un salarié classique et en attendent une reconnaissance. Nous réfléchissons à la nature que pourrait prendre cette reconnaissance, au-delà des petits accommodements actuels, comme d’avoir plus facilement l’accord pour un congé ou l’accès direct à mon bureau. L’information leur est également prioritairement diffusée et je leur laisse toute latitude lors des réunions pour l’organisation de leur équipe. Néanmoins, beaucoup de salariés ne se rendent pas compte du travail effectué par leur responsable de site ou d’activité. Nous devons être attentifs au risque qu’un site soit moins attractif que les autres du fait d’une mauvaise organisation, ce qui déséquilibrerait l’ensemble de la structure.

Int. : Comment gérez-vous les conflits ?

S. M. : Comme toute entreprise, nous avons effectivement des conflits à gérer et c’est moi, en tant que directeur, qui les prend en charge, choisit les sanctions éventuelles, décide des mises à pied si nécessaire. Si une absence n’est pas justifiée, si un salarié arrive en étant alcoolisé, etc., la sanction tombe, même si nous avons peut-être une approche un peu plus sociale que d’autres. À ce jour, nous n’avons eu que deux mises à pied et aucun licenciement, même si une menace plane sur l’un des deux en cas de récidive. Nous connaissons bien nos salariés et nous sommes particulièrement attentifs à certaines problématiques. Nous sommes également plus patients et, pour certains de nos salariés qui auraient déjà été licenciés dans une autre entreprise, nous avons choisi d’avancer avec eux. Deux ans après, on constate que certaines personnes ne sont plus les mêmes, qu’elles n’ont plus de mal à se mettre au travail et qu’elles se sont resocialisées. Alors, on se dit que cela en valait la peine.

Int. : Avez-vous des jeunes dans votre effectif ?

C. H. : En général, les jeunes sans emploi ne se sentent pas très concernés par le projet et sont souvent en rupture de confiance avec les dispositifs d’action publique. Néanmoins, le fait de trouver chez nous des lieux où passer un moment, pas forcément pour une démarche d’emploi, mais, par exemple, pour discuter avec un salarié qui, occupé à une tâche, leur propose de lui donner un coup de main, tout cela de manière très informelle, leur ouvre peu à peu des perspectives dont ils n’avaient pas conscience.

Int. : Comment gérez-vous les temps partiels ?

S. M. : Les personnes choisissent leur temps de travail si, par exemple, leur condition physique ne leur permet pas d’assumer plus de 20 heures par semaine. Si nous constatons, chez une personne entrée chez nous à temps plein, des difficultés pour s’y adapter, des absences ou des arrêts maladie importants, nous essaierons d’en comprendre avec elle les causes et nous pourrons, si elle le souhaite, réduire sa durée de travail hebdomadaire aussi longtemps qu’elle le jugera nécessaire. Notre ressource sera alors ajustée au prorata ainsi que sa rémunération.

Int. : Mobilisez-vous des bénévoles sur votre territoire ?

D. P. : Nous avons des compétences manquantes au sein de TEZEA, il nous faut donc les importer. Nous avons la chance d’avoir un projet assez médiatique et attractif qui amène les bénévoles à venir vers nous. Nous avons ainsi travaillé avec un comptable qui a énormément sécurisé cet aspect de notre gestion, jusqu’alors un peu faible. Au sein de l’équipe projet responsable de l’animation de ce réseau de bénévoles, nous avons tenu de nombreuses réunions afin de définir la posture des bénévoles au sein de TEZEA, pour qu’ils aident au mieux les personnes à devenir autonomes et à monter en compétences. De plus, ces bénévoles parlent de façon positive du projet autour d’eux et contribuent ainsi à le faire connaître. Le Service Civique est aussi une ressource que nous envisageons d’explorer.

Penser l’avenir

Int. : Vous ne pouvez ni être en concurrence sur votre territoire ni en sortir. Comment envisagez-vous alors le développement à terme de vos activités ?

S. M. : Nos activités ont démarré avec un taux d’occupation variant entre cinq minutes et une heure. Aujourd’hui, elles ont été pérennisées, la demande s’étant renouvelée et accrue. Toutes ne sont pas rentables, mais, pour l’instant, nous n’en avons abandonné aucune. La question du développement va bien finir par se poser de façon plus pressante. Il nous faudra peut-être alors nous rapprocher de tout ce qui relève des marchés publics, de la politique de la ville, etc. Or, même si tout n’est pas rentable, ce que nous faisons n’est pas pour autant insignifiant. Accroître la productivité au prix d’une réduction de la main d’oeuvre n’étant pas compatible avec la finalité d’une EBE, et le champ de l’économie que nous investissons étant celui, très vaste, des activités semi-rentables qui n’intéressent pas les entreprises classiques, nous aurons donc toujours besoin d’aide.

Int. : Il nous est difficile en France de reproduire à grande échelle une expérimentation réussie. Peut-on alors envisager une extension, au niveau du département par exemple ?

D. P. : Notre modèle ne nous permettra jamais de passer à la taille du département. Il fonctionne parce qu’il reste à taille humaine, que les gens sont “à portée d’engueulade” les uns des autres. Nous sommes actuellement implantés sur deux communes et nous pourrions, à l’avenir, envisager d’élargir notre action aux trois autres communes du bassin de vie de Pipriac, ce qui nous amènerait à embaucher 200 à 300 personnes au total. Nous n’irons cependant pas au-delà. Pour l’instant, nous préférons consolider le travail initial avant de l’étendre à ces trois autres communes. Je suis persuadé que ce projet doit rester à l’échelle d’un bassin de vie, car c’est à cette échelle que l’on peut créer la dynamique territoriale nécessaire à sa réussite. Ce projet est fédérateur et porteur d’une certaine fierté pour le territoire.

C. H. : Des projets analogues émergent dans d’autres territoires et des collègues viennent nous voir pour en parler. Nous pouvons alors réfléchir à la stratégie et à la programmation à une échelle supérieure, soit celle d’une intercommunalité en milieu rural, soit celle d’une métropole régionale. Le Pays Nivernais-Morvan a ainsi mobilisé dix communes autour de son projet et ce sont six comités locaux qui assureront la coordination sur ce territoire. Ce qui est important, c’est que la régulation locale et l’animation territoriale soient faites à une échelle qui permette une forte proximité. Cela n’implique cependant pas qu’il y ait six fois la même entreprise sur la même zone et ils réfléchissent à la manière de mutualiser les activités avec des unités de travail réparties sur tout le territoire. Comme il est nécessaire de réfléchir à une échelle plus large, celle de la décision politique, le projet trouve ainsi une articulation différente, mais qui ne remet pas en cause le fait que, pour que cela fonctionne, la mise en oeuvre opérationnelle doit être extrêmement locale.

Int. : Pour faire fonctionner ce modèle, il faut des gens comme vous, qu’à l’École de Paris nous appelons des entreprenants. Dès lors, comment cette expérience pourra-t-elle être dupliquée et s’étendre éventuellement sur le territoire national ?

C. H. : Ce qui est rassurant, c’est que nous voyons beaucoup d’entreprenants, issus en particulier de Territoires Zéro Chômeur de longue durée, qui manifestent leur intérêt pour le modèle et viennent nous voir parce qu’ils ont envie de développer quelque chose d’analogue sur leur propre territoire. Aujourd’hui, nous sommes ainsi en contact avec près de 200 territoires intéressés, dont les projets sont à des niveaux de maturité très diverse. La première loi, dite d’expérimentation, va s’arrêter en 2021. Si la deuxième phase d’expérimentation n’est pas actée, il est clair que nous disparaîtrons. À la lumière des premiers constats, il se trouve cependant que des résultats très satisfaisants ont d’ores et déjà été enregistrés. Maintenant, il nous faut obtenir cette deuxième loi et nous recevons des signaux plutôt positifs en ce sens. Nous avons un comité de soutien parlementaire composé de plus de 160 élus, le soutien d’élus locaux, etc., et des projets sont déjà engagés formellement dans plus de 60 territoires. La première loi a été votée grâce à la forte mobilisation des territoires. L’objectif est désormais que ces derniers soient suffisamment nombreux pour que cela devienne un enjeu national. La pétition qui circule en ce moment est l’une des manières de rendre visible cette mobilisation et plus de 2 millions de personnes ont vu le documentaire diffusé par M6 sur nos activités dans le territoire expérimental de Mauléon. Les multiples retours ont été extrêmement positifs.

D. P. : De son côté, le territoire de Pipriac et Saint-Ganton a récemment organisé une journée d’accueil des territoires volontaires du Grand Ouest. Cela a été l’occasion d’un long temps d’échange après une visite de TEZEA qui a permis à nos invités de découvrir concrètement la réalité de nos actions. En cela, il me paraît juste que la loi à venir prévoie un numerus clausus afin d’éviter que des gens de bonne volonté mais insuffisamment formés ne se mettent en situation d’échec.

C. H. : C’est pour cela qu’au sein de l’association Territoires zéro chômeur de longue durée, nous nous préparons aux projets futurs avec un centre de ressources et de développement et un organisme de formation des territoires dont la première session a ouvert ses portes en juin 2019.

1 Patrick Valentin et Michel de Virville, « L’opération Territoires zéro chômeur de longue durée », séminaire Économie et sens de l’École de Paris du management, séance du 11 janvier 2017.

2 Laurent Grandguillaume est député PS de la Côte-d’Or. Après une rencontre avec Patrick Valentin, il a créé un groupe de travail en 2014 à l’Assemblée nationale afin de préparer une proposition de loi visant à expérimenter l’idée des Territoires zéro chômeur de longue durée (source Wikipedia).

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