Synthèse du rapport III AR6 du GIEC

Groupe de travail III

François Beny, Stéphanie Canas, Manoel Chavanne, Denis Deutsch, Léa Persoz, Alexandre Tuel, avril 2022

Le GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) est une organisation regroupant 195 États membres de l’ONU dont l’objectif est de faire régulièrement un état des lieux sans parti pris des connaissances scientifiques les plus avancées sur le climat. Il réunit des milliers d’experts volontaires du monde entier pour évaluer, analyser et synthétiser les nombreuses études scientifiques sur le sujet. Les rapports du GIEC sont au cœur des négociations internationales sur le climat, tel que l’Accord de Paris (COP21) en 2015 et la COP26 qui aura lieu à Glasgow en novembre. En 2007, le GIEC a partagé le prix Nobel de la Paix avec Al Gore. Le GIEC est organisé en trois groupes de travail. Le groupe 1 étudie les aspects scientifiques du changement climatique et a produit ce rapport. Le groupe 2 évalue les conséquences, la vulnérabilité et l’adaptation au changement climatique, et le groupe 3 étudie son atténuation ; ils publieront leur rapport en 2022.

À télécharger : rapport_wgiii.pdf (430 Kio)

Introduction

Beaucoup de choses ont changé depuis le cinquième rapport du GIEC datant de 2012. L’Accord de Paris (2015) et l’attention croissante portée aux enjeux climatiques par les sociétés civiles et les acteurs économiques ont davantage mis les objectifs climatiques à l’ordre du jour. Les liens entre trajectoires d’émissions de gaz à effet de serre (GES) et développement économique et social sont également mieux compris. Enfin, la poursuite de la croissance des émissions de GES depuis 2010 a augmenté les risques climatiques et a très sérieusement contraint les trajectoires futures compatibles avec un réchauffement de 1,5°C ou 2°C.

Ce résumé débute par une mise au point sur la situation actuelle des émissions, et les trajectoires à suivre. Ensuite, il identifie les différents leviers d’actions possibles pour suivre ces trajectoires. Enfin, il dresse un bilan sectoriel en termes d’émissions actuelles, de trajectoires à suivre, et de moyens d’actions.

Émissions de GES actuelles et trajectoires futures

Les humains émettent plusieurs types de GES, chacun ayant une durée de vie dans l’atmosphère et un pouvoir réchauffant différent. Pour comparer les émissions de différents GES entre elles, elles sont donc converties à une unité commune – le « CO2 équivalent », noté CO2-éq, qui correspond, de manière simplifiée, à la quantité de CO2 qui causerait un réchauffement équivalent sur une période de référence, ici 100 ans.

Panorama des émissions actuelles

Bien que les émissions annuelles mondiales de GES aient augmenté moins vite depuis 2010 par rapport aux décennies précédentes, elles ont atteint leur plus haut niveau historique en 2019 : 59 GtCO2-éq. C’est 12% de plus qu’en 2010, et 54% de plus qu’en 1990. Cette augmentation concerne tous les principaux GES (figure 1). En 2019, les émissions se répartissaient entre le CO2 issu des combustibles fossiles et de l’industrie (38 GtCO2), du CO2 issu du secteur de l’agriculture, de la foresterie, et des autres affectations des terres (AFAT) (6,6 GtCO2), du méthane (11 GtCO2-éq, soit 18% du total), du protoxyde d’azote (N2O ; 2,7 GtCO2-éq), et des gaz fluorés (1,4 GtCO2-éq).

Disparités mondiales

Chaque humain émet en moyenne 8 tonnes de CO2-éq par an. Ce chiffre ne reflète cependant pas l’énorme variabilité des émissions, largement liée aux inégalités de revenus : de 2,6 à 19 tCO2-éq par habitant pour l’Asie du Sud et l’Amérique du Nord, respectivement. Les émissions sont en effet proportionnellement bien plus importantes dans les pays développés, et au sein de chaque pays, principalement concentrées parmi les habitants les plus riches. À l’échelle mondiale, les 10% les plus riches de la population sont responsables d’environ 40% des émissions de GES, environ 15 fois plus par personne que les 50% les plus pauvres.

Tendances actuelles et trajectoires à suivre

Les engagements pris par les États suite à l’Accord de Paris ne sont pas compatibles avec une limitation du réchauffement à 1,5°C à horizon 2100 (pour laquelle le budget carbone restant est de 500 GtCO2). Ils rendent même l’objectif de rester sous la barre des +2°C difficilement atteignable. Les lois adoptées avant fin 2020 conduiraient ainsi à une hausse des températures de 3,2°C d’ici 2100. Une limitation du réchauffement à 1,5°C implique que les émissions atteignent un pic avant 2025 puis baissent de 43% d’ici à 2030 par rapport à 2019, et de 84% d’ici 2050. De telles réductions nécessitent de transformer tous les secteurs économiques, et d’atteindre le “net zéro” émission de CO2 d’ici 2050 (émissions résiduelles compensées par capture et stockage de carbone - CSC). Les émissions d’autres GES doivent également baisser fortement. Plus cette baisse tardera, plus il faudra faire appel au CSC dans la deuxième moitié du XXIème siècle. Toutefois, dans tous les scénarios, les secteurs du transport, du bâtiment et de l’industrie atteignent le net zéro plus tard que les secteurs de la production d’énergie et de l’AFAT. De la même manière, toutes les régions du monde n’atteindront pas le net zéro en même temps.

Les trajectoires d’émissions ne sont pas uniquement fonction de nos décisions futures, mais aussi des choix faits par le passé. Sur la base de leur fonctionnement actuel, les infrastructures existantes utilisant des combustibles fossiles (centrales à charbon par exemple) émettront environ 660 Gt de CO2-éq durant leur vie, un chiffre qui monte à 850 Gt en incluant les infrastructures en projet. Il est ainsi évident qu’il va falloir abandonner une partie de ces infrastructures avant leur fin de vie prévue pour garder une chance de limiter le réchauffement à 1,5°C ou même 2°C.

Émissions de GES et pandémie

En 2020, la pandémie mondiale de COVID-19 a engendré une baisse historique de 5,8% (soit 2 GtCO2) des émissions de CO2 provenant de la combustion des combustibles fossiles et de l’industrie par rapport à 2019. En dépit de cette baisse, la concentration de GES a continué d’augmenter en 2020. De plus, les émissions de CO2 sont de nouveau reparties à la hausse dès fin 2020.

Principaux leviers d’actions

Diminution de l’intensité carbone

Le développement, le déploiement et le transfert de technologies peuvent aider à atteindre les objectifs climatiques et de développement durable. La technologie peut améliorer le bien-être des individus sans augmenter les émissions, les impacts environnementaux et la demande en ressources naturelles. Les technologies digitales, par exemple, peuvent contribuer à rendre les procédés industriels et énergétiques plus efficaces. Cependant, dans certains secteurs, sans gestion organisée, la technologie peut aussi accroître la demande en énergie (effet rebond), exacerber les inégalités, concentrer le pouvoir, accentuer les problèmes d’éthique, créer du chômage et compromettre le bien-être des citoyens.

Au niveau mondial, la croissance de la consommation matérielle, liée à l’accroissement des revenus, est le principal moteur de l’augmentation des émissions de GES, devant la croissance démographique. L’adoption de technologies plus efficientes en termes d’énergie, ainsi que de moyens de production d’énergie moins carbonés, a certes permis de réduire l’intensité carbone de l’économie (c’est-à-dire la quantité de CO2 émise par unité de richesse produite), mais n’a pas compensé l’effet de la croissance économique. De nombreux pays ont ainsi atteint un découplage entre croissance économique et émissions, sans pour autant émettre moins de GES en valeur absolue. Seuls une vingtaine de pays ont réussi à réduire leurs émissions territoriales pendant au moins 10 ans, à un rythme suffisant pour limiter le réchauffement climatique à 2°C d’ici 2100. Notons néanmoins que les émissions territoriales ne tiennent pas compte des émissions liées aux importations et exportations, notamment associées aux délocalisations industrielles. Ainsi, une partie des émissions territoriales des pays en développement est due à la production de biens à destination des pays développés. Par exemple, 40% de l’empreinte carbone de la France ou de l’Allemagne proviennent de leurs importations.

Rôle de la finance

La finance a également un rôle important à jouer dans la transition énergétique. Les flux financiers doivent notamment être redirigés vers des investissements cohérents avec les objectifs climatiques, comme souligné par l’Accord de Paris. C’est d’autant plus nécessaire que les pays développés n’ont pas respecté leur engagement, pris à la COP15 en 2009, de financer des mesures climatiques dans les pays en développement à hauteur de 100 milliards de dollars par an, ce qui pose des problèmes de confiance dans les négociations internationales.

Les investissements en faveur de l’adaptation et de l’atténuation ont certes augmenté de 60% entre 2013 et 2020 mais restent encore très inférieurs au niveau nécessaire pour limiter le réchauffement à 2°C. Plusieurs outils économiques ont été développés. Les systèmes de tarification du carbone couvrent désormais 20% des émissions mondiales de CO2. Les marchés d’obligations vertes et de finance durable se sont également multipliés, bien que les acteurs privés, qui représentent 60% du total des financements, restent réticents à investir dans des domaines où les rendements économiques ne sont pas garantis. De plus, la pandémie a exacerbé les inégalités de capacités financières entre pays. Harmoniser plans de relance post- Covid et objectifs climatiques pourrait potentiellement répondre aux besoins financiers et réduire les points de blocage. À court terme, cette harmonisation serait nécessaire afin de remplir les objectifs de financement des besoins avant 2030, sachant qu’à moyen terme ceci diminuerait le coût pour les contribuables.

Agir sur la demande Agir sur la demande en biens et services a un impact significatif sur les émissions. Une réduction des émissions de 40 à 70% est possible en mettant en place une stratégie de sobriété à grande échelle s’articulant autour de trois piliers : “éviter”, “changer” et “améliorer” (figure 3). « Éviter » a le plus fort potentiel dans les transports : moins prendre l’avion et limiter au maximum l’utilisation de la voiture en adaptant les infrastructures. « Changer » a le plus de potentiel dans l’alimentation, en adoptant un régime à base de plantes. « Améliorer » a plus de potentiel dans le bâtiment grâce au développement de l’habitat passif. Une telle stratégie permettrait aussi de limiter le recours aux technologies de capture du carbone et les risques associés à l’utilisation des terres ainsi que des ressources. Les confinements lors de la pandémie de COVID-19 ont d’ailleurs montré que des changements de comportement rapides et à large échelle sont possibles.

Les individus peuvent contribuer à la sobriété en tant que consommateurs, citoyens, investisseurs et professionnels. Les plus privilégiés ont la capacité de réduire leurs émissions tout en montrant l’exemple de modes de vie bas carbone : en évitant l’avion, en vivant sans voiture, en passant à l’électromobilité. De nouvelles normes sociales pourraient s’établir si 10-30% de la population changeaient de comportement en favorisant les actions bas-carbone. Mais les changements de comportement individuel, seuls, ne permettront pas de réduire les émissions de GES de façon significative : une action à l’échelle collective est nécessaire.

Échelle collective et coopération internationale

Depuis 2014, les enjeux de politiques climatiques sont désormais discutés à de multiples niveaux, du local au national. On observe un engagement accru d’acteurs non-étatiques en faveur de l’atténuation : collectivités locales, société civile, entreprises et investisseurs, ou encore peuples indigènes. Leurs actions – diffusion du savoir, actions en justice, ou expérimentations locales – ont un impact de plus en plus significatif et contribuent à modifier les objectifs climatiques nationaux. L’Accord de Paris constitue également un tournant dans les politiques climatiques nationales. Il met l’accent sur des objectifs climatiques toujours plus ambitieux et sur la conciliation de l’atténuation climatique et du développement durable. De nombreux pays se sont donné des objectifs en termes de baisse d’émissions, mais leur législation n’est souvent pas à niveau ; omettant parfois même d’intégrer certains GES comme le méthane.

Les politiques de développement doivent viser à la fois une réduction des émissions et encourager des modes de vie durables. Pour cela, de nouvelles normes sociales doivent être établies. Pour qu’elles soient acceptées, des changements structurels de nos sociétés reposant sur des principes d’équité et de justice sociale sont nécessaires, notamment via des incitations économiques. Des transitions équitables, du niveau local au niveau international, permettent d’éviter que les personnes et communautés les plus vulnérables ne soient délaissées. De plus, augmenter la participation des femmes, des groupes minoritaires et marginalisés amplifie l’essor de l’action climatique. Les pays dont l’économie repose principalement sur les revenus des énergies fossiles vont être particulièrement affectés par des mesures fortes d’atténuation des émissions de GES. Ces scénarios de transition doivent donc tenir compte des caractéristiques de chaque pays (contexte, délais de mise en place, conceptions des réglementations). Des études montrent que les énergies bas-carbone offrent plus d’opportunités de travail que les combustibles fossiles.

Les capacités d’adaptation et d’atténuation des pays en développement sont plus faibles en raison de ressources économiques et institutionnelles limitées. La coopération internationale permettrait ainsi d’atteindre des objectifs climatiques ambitieux grâce au partage de ressources financières et technologiques. Certains engagements nationaux ne seront pas possibles sans ce soutien. Les partenariats peuvent concerner non seulement les États, mais aussi les villes, les organisations non gouvernementales et le secteur privé. La coopération est d’autant plus importante que les obstacles institutionnels et économiques sont potentiellement plus grands que les obstacles technologiques et physiques.

Un tiers des émissions mondiales de GES en 2019 était dû à la production énergétique (figure 4a). Mais l’électricité et la chaleur sont destinées à d‘autres secteurs. Ainsi, après attribution des émissions aux secteurs consommant cette énergie, le plus gros émetteur devient l’industrie avec 34% des émissions. AFAT, transport et bâtiment représentent respectivement 22%, 15% et 16%. Les 12% restants sont dus aux pertes diverses du système énergétique, par exemple fuites sur gazoducs.

Production énergétique

Des changements majeurs sont nécessaires dans ce secteur : diminution drastique des énergies fossiles, recours aux énergies alternatives, sobriété et efficacité énergétique. Pour limiter le réchauffement à 1,5°C, l’utilisation de charbon, de pétrole et de gaz devra diminuer d’ici 2050 de 95, 60 et 45%, respectivement. Continuer d’installer des infrastructures de production d’énergie fossile accaparera une partie du budget carbone restant.

Dans le mix énergétique mondial, la part de l’électricité est appelée à augmenter largement, de 20% actuellement à environ 50% à l’horizon 2050. L’électricité devra en outre être produite à 95% par des technologies bas-carbone en 2050 pour rester en dessous de 2°C, contre moins de 40% aujourd’hui (dont 8% solaire et éolien).

Le développement des énergies renouvelables, encouragé par les politiques publiques et la baisse continue des coûts (solaire -56%, éolien -45%, batteries -64% entre 2015 et 2020), a déjà permis de ralentir la croissance des émissions liées à la production énergétique. Cette décarbonation, toute relative, du système de production de l’énergie a été observée en Amérique du Nord, en Europe, et en Eurasie. Toutefois, elle n’a pas conduit à une baisse absolue des émissions en raison de la hausse de la demande mondiale.

Transports

Le secteur représente 15% des émissions de GES, et est celui qui a le plus augmenté sur la dernière décennie (+1,8% par an). Le transport routier domine avec 70% des émissions, suivi de l’aviation (11%), du transport maritime (10%) et du rail (1%). L’intensité carbone du transport a également augmenté, surtout en raison de la hausse des émissions de l’aviation (+3,3% par an depuis 2010) et du déploiement des SUV (40% des ventes en 2019).

Pour limiter le réchauffement à 1,5°C, le secteur des transports devra réduire ses émissions de 59% d’ici à 2050 (et de 29% pour rester en dessous de 2°C). Pour atteindre ces objectifs, il est nécessaire de mettre en place des programmes de réduction de la demande, d’améliorer l’efficacité énergétique, et d’adapter les infrastructures. Pour les déplacements de personnes, cela se traduit par le développement des transports en commun, des transports actifs (vélo, marche, …) et de la mobilité locale partagée (covoiturage, voiture partagée…). De tels changements nécessitent un travail important de réorganisation des plans d’urbanisme et de l’usage des sols. Quant au fret (routier, aérien, maritime), la réduction des émissions dépendra beaucoup des décisions politiques et des progrès technologiques.

Quant à l’intensité carbone du secteur des transports, l’électrification des véhicules légers pourrait être le principal facteur de réduction d’émissions de GES d’ici 2050. Améliorer les technologies de stockage (matériaux utilisés, efficacité énergétique et recyclage) permet de réduire l’empreinte environnementale de cette électrification. Aux nouvelles batteries chimiques à forte densité énergétique, d’autres solutions comme l’hydrogène, les biocarburants ou les carburants synthétiques durables s’ajoutent pour contribuer à diminuer les émissions du secteur.

Notons aussi que l’adoption de l’électromobilité et le développement des transports publics et de la mobilité active induisent des co-bénéfices grâce à leurs impacts positifs sur la qualité de l’air, la santé, l’accès à l’éducation et l’égalité des genres.

Bâtiment

Les émissions du secteur ont augmenté de 50% entre 1990 et 2019. Elles représentent 16% des émissions mondiales de GES, en comptant les émissions directes (surtout chauffage) et indirectes (dues à la production d’électricité consommée dans les bâtiments). Les émissions du secteur atteignent même 21% en comptant celles liées à la production des matériaux de construction (acier, ciment).

Les pistes de réduction pour ce secteur sont multiples : allongement de la durée de vie des bâtiments et des matériaux utilisés pour les construire, densification de l’habitat, végétalisation des toitures et des façades et intensification des efforts d’économie d’énergie. Sur ce dernier point, il faudra être vigilant au surchauffage des bâtiments et à l’augmentation de la climatisation (+75% entre 1990 et 2019).

Enfin, de nombreuses mesures de réduction des émissions dans le bâtiment génèrent des cobénéfices. Par exemple, dans les villes, les toits et façades végétalisés, et les espaces verts augmentent nos capacités d’adaptation au changement climatique, en contribuant à lutter contre les inondations et les effets d’îlots de chaleur, et à diminuer les risques alimentaires.

Agriculture, Foresterie, et affectations des terres (AFAT)

Le secteur AFAT représente actuellement 22% des émissions mondiales de GES. Il présente un important potentiel d’atténuation à court terme à un coût relativement faible. D’ici 2050, il pourrait fournir 20 à 30 % de l’effort de réduction des émissions nécessaire pour limiter le réchauffement à 2°C. Les possibilités pour réduire les émissions sont nombreuses : préservation, amélioration de la gestion et de la restauration des espaces naturels, intensification agricole durable (agroécologie, permaculture, …), stockage de carbone dans les sols cultivés, CSC, substitution des combustibles fossiles par des bioénergies, réduction de la demande agricole via une réduction du gaspillage et une alimentation moins carnée. Réduire la déforestation dans les régions tropicales a le plus grand potentiel d’atténuation du secteur. En effet, la déforestation mondiale représente 45 % des émissions totales de l’AFAT. Les stratégies net-zéro devraient notamment encourager le financement des actions de compensation carbone (reforestation, restauration des terres dégradées…).

Atteindre les objectifs de réduction d’émissions du secteur AFAT implique de surmonter des contraintes institutionnelles, économiques et politiques, et de gérer les conflits d’usages. Pour atteindre les objectifs dans ce secteur, la recherche et le développement sont essentiels, ainsi que la diffusion des technologies, des données et des savoir-faire. Il ne faut pas que l’accès limité à ces derniers constitue un obstacle à la mise en oeuvre des mesures d’atténuation. Le succès des politiques et des mesures repose sur une gouvernance mettant l’accent sur la planification et la gestion intégrées de l’utilisation des terres dans le cadre des objectifs de développement durable de l’ONU, et apportant un soutien à leur mise en oeuvre.

La réduction des émissions du secteur AFAT s’accompagne de co-bénéfices. Par exemple, la reforestation va également bénéficier à la biodiversité, accroissant les services rendus par les écosystèmes. Sur les zones côtières, la préservation des mangroves et zones humides permet de stocker du carbone, de réduire l’érosion littorale, et de limiter les effets de la montée des eaux. Une alimentation moins émettrice de GES a aussi des bénéfices sur la santé. Une gestion durable des terres agricoles permettra d’éviter la dégradation des terres, et de lutter contre l’insécurité alimentaire.

Industrie

L’industrie est le plus gros émetteur de GES, avec 34% du total mondial. Les émissions liées à la production des matières premières pourront être compensées en combinant électrification des processus de production, recours aux biocarburants, captage et stockage du CO2, et efficacité technologique. L’industrie manufacturière pourra être largement décarbonée en basculant à des combustibles peu émissifs, comme l’hydrogène par exemple. La gestion raisonnée de la demande et le développement de l’économie circulaire aideront également à réduire le besoin en matières premières.

La séquestration de carbone est nécessaire pour atteindre le net zéro dans la majorité des scénarios limitant le réchauffement à 1,5 ou 2°C. Elle repose sur deux types de solutions : d’une part, les solutions technologiques : capture et stockage du CO2 à la source (centrale thermique par exemple) et capture directe du CO2 atmosphérique ; et d’autre part, les solutions naturelles, présentées dans le secteur AFAT. Le potentiel de séquestration est évidemment très lié au coût du carbone : les estimations de prix sont extrêmement variables selon les procédés de capture.

Atteindre le net zéro dans le secteur de l’industrie nécessitera des efforts en matière de gouvernance, de relocalisation ou/et de formation pour limiter les impacts sociétaux des mesures à prendre.

Jamais l’humanité n’a émis autant de GES qu’aujourd’hui. Les émissions continuent de croître malgré les politiques mises en oeuvre, nous menant vers un réchauffement de 3,2°C en 2100. Sans réduction profonde et immédiate des émissions dans tous les secteurs, les +1,5°C sont hors d’atteinte. Des solutions permettant de réduire de moitié les émissions d’ici 2030 existent déjà dans tous les secteurs. Les preuves sont claires : le temps d’agir, c’est maintenant !

Références

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