Les Exurbs aux Etats-Unis

Eric Charmes, octobre 2015

Aux États-Unis, certains chercheurs utilisent le terme exurbs pour désigner les quartiers d’habitation pavillonnaires insérés dans un environnement rural et donc physiquement détachés de l’agglomération dont ils dépendent. Ces territoires suscitent un intérêt moindre qu’en France. Ils ne sont pas ignorés pour autant. Ils ont connu un regain d’attention avec diverses publications faisant des exurbs des territoires clés dans le maintien au pouvoir des Républicains à l’occasion des élections présidentielles de 2004.

Dans ce contexte, la Brookings institution a financé des recherches pour quantifier le poids démographique des couronnes exurbaines. Ce travail est d’autant plus intéressant qu’à la différence de ce qui est fait dans de nombreuses autres recherches conduites aux Etats-Unis, l’unité de base utilisée pour catégoriser les espaces urbains n’est pas le comté (dont la population moyenne est de l’ordre de 100 000 habitants) mais le « census tract » soit une unité dont la population varie entre 1 500 et 8 000 habitants, ce qui est une échelle proche de celle des communes périurbaines françaises. La population exurbaine ressort alors à 10 % de la population des métropoles de plus de 500 000 habitants (Berube et alii, 2006). Le phénomène n’est donc pas négligeable, même s’il reste en deçà de ce qu’il est en France.

La comparaison est toutefois délicate car les critères utilisés par la Brookings Institution pour définir les exurbs sont différents de ceux utilisés par l’INSEE pour définir le caractère périurbain d’une commune. D’abord, il suffit que 20 % des habitants d’un secteur (census tract) travaillent hors du dit secteur et dans une agglomération pour que ce secteur soit qualifié d’exurbs. Ce seuil est moins restrictif que celui utilisé par l’INSEE, même s’il s’applique seulement aux personnes travaillant dans l’équivalent du pôle urbain et non dans l’ensemble de l’aire urbaine (autrement dit, les exurbs sont ici définies en une seule fois, c’est-à-dire sans extension itérative des aires urbaines). Par ailleurs, les chercheurs de la Brookings Institution ont appliqué des critères de densité minimale pour définir le caractère « exurbain » (ainsi d’ailleurs qu’il serait souhaitable que l’INSEE le fasse).

Surtout, à la différence de la France, ces exurbs constituent des noyaux d’urbanisation beaucoup plus importants que les unités de l’ordre du millier d’habitants formés par les communes périurbaines françaises. Et, sauf cas particuliers, ces noyaux sont généralement appelés à s’étendre et non à demeurer des villages. Autrement dit, à la différence de leurs homologues françaises (voir Des villes qui s’étalent en s’émiettant), beaucoup d’exurbs étasuniennes sont appelées à rejoindre les suburbs et à alimenter le sprawl.

Références

BERUBE Alan, Audrey SINGER, Jill H. WILSON et William H. FREY, 2006, Finding Exurbia: America’s Fast-Growing Communities at the Metropolitan Fringe, Living Cities Census Series, October, The Brookings Institution