La communauté de La Poudrière à Bruxelles

Un habitat collectif pour changer de vie

Pascale Thys, 2009

Contexte

Le projet est né en 1958, dans un quartier « pauvre » de Bruxelles, suite à la rencontre de deux religieux, qui avait accueilli des personnes en difficulté sans rien demander en échange et d’un couple qui s’est joint à eux pour faire de même. « Cela est arrivé comme cela car quelqu’un leur a demandé quelque chose et qu’ils ont dit oui. Aujourd’hui on en est toujours à ce stade : dire oui ».

Depuis 4 autres lieux ont vu le jour (à Vilvoorde, Péruwelz, Rummen, et Anderlecht). Il s’agit principalement d’anciens édifices industriels et de maisons réaménagées en logements et autres lieux de travail.

Une 30e de personnes vit dans la maison de la rue de la Poudrière, située dans un quartier habité en majorité par des personnes d’origine étrangère.

Type de public

Les publics sont variés et issus de tous les milieux. On peut y rencontrer aussi bien un professeur d’université, un père jésuite, des chômeurs, des pensionnés, que des personnes émargeant au CPAS. « On n’imagine pas notre style de vie uniquement avec des personnes qui gagnent bien leur vie. Il n’y a d’exclusive d’aucune sorte, tout est possible ».

Aucune statistique n’est réalisée pour déterminer le nombre exact de membres de la communauté, des personnes de passages ni leurs statuts1.

Condition d’accès et motivations

On arrive dans la communauté de diverses façons : pour l’un c’est suite à la lecture d’un article ; telle personne est née dans la communauté ; telle autre a rencontré un membre, etc.

Le but de la communauté est de vivre ensemble en communauté en respectant 5 objectifs : la présence (les uns aux autres, ouverture à l’extérieur); l’amitié ; la justice (pas de différence entre riches et pauvres) ; l’espérance (il est possible de construire autre chose) ; l’ascèse (vie loin des sollicitations pour atteindre une certaine sérénité).

Et il y a 4 moyens pour mettre en œuvre ces objectifs : le travail, le partage et la mise en commun, un style de vie simple et la fidélité aux personnes et aux objectifs.

Si la personne qui souhaite rejoindre la communauté accepte de respecter ces objectifs et les conditions de vie commune, elle est la bienvenue. Il n’y a pas de contrat écrit.

Personne n’est refusé, il suffit d’accepter les conditions.

Parfois il arrive qu’une personne candidate, avec des problèmes, ne puisse pas être accueillie par la communauté et on lui demande d’attendre un peu. Suite à leur expérience, les responsables se sont rendus compte qu’il était difficile de faire cohabiter des personnes qui ont les mêmes problèmes. « Elles s’enfonceront les unes les autres et donc on ne peut pas mettre ensemble des personnes qui vont s’enfoncer mutuellement ».

Mode de fonctionnement

Chaque membre, qui le peut, travaille pour la communauté. Les 5 maisons ont mis en place des activités rentables, comme par exemple : une entreprise de déménagement, la vente de meubles de seconde main, la récolte de vêtements, la culture et l’élevage. Les finances des 5 maisons sont gérées en commun.

La communauté de La Poudrière est une association sans but lucratif depuis 1964. Juridiquement toutes les personnes qui travaillent pour la communauté le font bénévolement, il n’y a pas de salariés. Chacun garde son statut particulier : le chômeur perçoit ses allocations de chômage ; le pensionné sa pension, etc. Volontairement, sans obligation, tous les membres reversent l’intégralité de leurs revenus à l’asbl. Chacun des membres reçoit 20€ euros par semaine. Il n’y a pas de loyer (chacun a une chambre, un appartement dans le cas des familles), ni de frais de nourriture. Ce que les gens possèdent d’autre part (biens divers) restent leur propriété. Celui qui quitte la communauté retrouvera ce qu’il avait avant. Il n’y a pas de règlement intérieur, mais il y a une sorte de charte orale qui gère la vie en commun, comme par exemple le fait que les repas soient pris en commun et qu’on ne puisse se lever de table qu’une demi heure après le début du repas.

Les tâches (préparation des repas, lessive, …) sont réparties entre les membres.

Les décisions sont prises à l’unanimité (voir partie outils et méthodes).

Type d’accompagnement social

Il n’y a pas d’accompagnement social. Les personnes qui en ont besoin sont orientées vers des services extérieurs (choisis par la personne elle-même, et payés par la communauté), afin de sortir le problème de la communauté. « C’est comme dans une famille, quand quelqu’un a un problème on fait appel à un assistant social, psychologue extérieur ».

Mixité entre les populations

Les membres de la communauté sont issus de milieux différents. Ils mettent leur ressources en commun ce qui permet à la communauté de vivre. « Cela ne se crée pas on ne peut pas le fabriquer artificiellement ».

Au côté des membres on trouve aussi des personnes de passage pour une journée, un repas, … Par exemple un tel vient une fois par semaine pour travailler bénévolement et prendre le repas ; une autre est une étudiante qui est là pour deux mois ½ avant de partir en amérique latine.

La Communauté comprend à peu près 80 personnes de tous âges et des deux sexes (environ 2/3 d’hommes) .

Les parents sont responsables de leurs enfants, choisissent leur école, … Ici les enfants ont plusieurs « grands frères », « tantes », …

Type de solution

Cela peut aller du très court terme, un repas, une journée par semaine, à du long terme (certains sont là depuis 1958).

Outils et méthodes

Toutes les décisions sont prises à l’unanimité. Il n’y a pas de décision à la majorité et ce pour éviter les frustrations.

Quelques règles importantes : chacun ne sort que lorsqu’il a son comptant de parole ; il est interdit d’interrompre quelqu’un qui parle.

Les idées viennent lors d’une réunion, ensuite la réunion suivante on fait les propositions et tout le monde donne son avis. Ensuite on passe à la décision.

Chacune des 5 maisons a une réunion hebdomadaire.

De plus, une fois par mois il y a une réunion de propositions/décisions c’est la « réunion mensuelle ».

Une fois par mois (1/2 jour durant lequel personne ne travaille) il y a aussi une réunion pour parler d’un thème de réflexion, on s’y ressource, c’est la « réunion source » .

Pendant ce temps-là les nouveaux sont rassemblés et on leur explique l’histoire de la communauté.

Une réunion des 5 maisons est organisée une fois par mois, c’est la « réunion spaghetti » car très souvent on y mange des spaghetti.

Il y a aussi, comme dans toute asbl, des réunions du conseil d’administration (composé de personnes membres de la communauté et de personnes extérieures) et une assemblée générale où sont faits les compte rendu des activités.

Sources

  • Max Delespesse, La communauté de la Poudrière, 1998, éd. Luc Pire, Bruxelles (histoire).

  • Noël Rixhon, Rendre possible l’impossible, éd.Luc Pire, 2001 (recueil des textes et notes du père Léon Van Hoorde, co-fondateur de la communauté décédé en 1996).

  • Communauté de La Poudrière. Chants d’espoir. Champ d’espérance, 1995.

  • Communauté de La Poudrière, Apprendre… réapprendre à Vivre ensemble.

To go further

Cette fiche a été réalisée à partir d’un entretien avec Dominique Schiltz, père jésuite, responsable de la maison de la communauté située rue de la Poudrière.