Exercer sa citoyenneté dans la ville : quartier et urbanité

Fabio Mattioli, juin 2006

«Citoyenneté» et «quartier» ont souvent été interprétés comme des dimensions différentes et inconciliables, le quartier étant dominé par des relations amicales, particulières et sociales, la citoyenneté étant plutôt le haut lieu de l’universalisme, du droit et du politique. Ces domaines seraient de fait exclusifs: un individu habitant le quartier serait a priori incapable de s’élever au niveau de la «vraie Politique» car il serait toujours limité par ses attachements au quotidien. Telle est l’image de l’habitant que semblent avoir les pouvoirs politiques. Parallèlement, le local et le quartier deviennent les espaces mythiques et édéniques des relations humaines : comme si tous les habitants se connaissaient, se saluaient, et passaient leur temps à entretenir des relations courtoises et réciproques.

Suivant cette pensée, les administrations publiques ont souvent tendance à attribuer des compétences spécifiques aux habitants du quartier, mais seulement dans la mesure où leurs revendications restent dans la sphère de la convivialité et du local. Naturellement, la convivialité est un moment qui ne peut présenter d’antagonismes ni de contestations: cela mène à l’impasse actuel où l’habitant a une place particulière dans les réflexions administratives tant qu’il ne parle pas de politique et qu’il ne manifeste pas d’opinions divergentes.

Or, l’habitant est la même personne qui va voter lors des élections, et qui dans d’autres moments de sa vie a pu participer à des discussions collectives à un haut niveau d’abstraction: pourquoi le fait d’être dans son quartier le fait donc redevenir enfant, incapable de penser aux problèmes communs dans une optique politique, limité à des seules questions particulières et locales?

Ces conflits d’interprétations se révèlent dans leurs dimensions concrètes quand les habitants prennent conscience de la portée politique de leurs actions et ne se contentent plus de ce rôle construit par la fiction administrative; ainsi naissent les mobilisations des citoyens-habitants, dont les formes peuvent varier énormément, et dont les relations avec les institutions publiques sont souvent très difficiles.

Il semble donc nécessaire de réunir une série de contributions concernant des expériences et situations qui ouvrent d’autres perspectives sur l’habitant et la vie de quartier: il n’est pas question de nier la compétence de l’habitant concernant les lieux où il vit. Il est plutôt important de montrer en quoi cette expertise ne se limite pas à la simple connaissance touristique du territoire, mais possède directement des implications et significations politiques. Connaître le territoire, y être présent, discuter et engager les autres acteurs dans des relations, se porter comme médiateur informel des conflits, discuter chaque jour des problèmes communs, se montrer solidaire des autres habitants et personnes circulant dans le quartier : ce sont des façons de faire la politique. Face à cela on s’interrogera sur la relation que les habitants peuvent avoir avec la politique formelle et les professionnels du politique : comment rendre la participation active et profitable à tous?

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